A Liverpool, en Angleterre, les promeneurs qui traversent la vieille ville se retrouveraient parfois projetés dans le passé, généralement dans les années 1950-1960. Ce phénomène, qui aurait été rapporté par de nombreux témoins, se produirait dans toute la ville et dans ses environs mais il serait néanmoins plus fréquent sur Bold Street, une grande avenue commerçante du centre-ville.
Frank et Carol à la Librairie Waterstones
Un jour de 1996, Frank et sa femme Carol, qui avaient décidé d’aller faire du shopping, prirent le train pour Liverpool et une fois à la gare centrale ils se mirent en route pour la grande librairie Waterstones, où Carol espérait trouver le roman Trainspotting d’Irvine Welsh. En arrivant au centre-ville Frank demanda à sa femme s’ils pouvaient s’arrêter dans un certain magasin dont il venait de se souvenir et elle lui proposa d’y passer avant de rejoindre Bold Street, où se trouvait la librairie. Ils sortaient de la boutique quand Frank se heurta à l’un de ses amis et les deux hommes commencèrent à discuter. Au début, Carol s’intéressa poliment à la conversation mais comme le temps passait et qu’ils continuaient à parler alors elle décida de s’avancer, proposant à son mari de la retrouver à la librairie dès qu’il aurait terminé.
Quelques minutes plus tard, Frank prit la direction de Bold Street pour y rejoindre sa femme et il s’approchait de la librairie Waterstones quand levant machinalement les yeux il remarqua que le nom de Cripps était inscrit en grosses lettres au-dessus de la porte. Troublé, il commença à traverser la route mais tout à coup une camionnette, qui affichait le sigle de la société Cardin sur le côté, passa juste devant lui en klaxonnant furieusement et prenant brusquement conscience de son imprudence, il fit un pas en arrière. Il attendait que la circulation se calme, regardant distraitement la rue, lorsqu’une voiture attira son attention et l’observant plus attentivement il songea qu’il n’en avait plus vu de ce modèle depuis des années.
Frank la regardait s’éloigner, nostalgique, quand il réalisa que tous les véhicules qui défilaient devant lui dataient de la même époque, probablement des années 1950-1960, et brusquement mal à l’aise il quitta la file des yeux pour se concentrer sur les passants qui déambulaient sur le trottoir d’en face. Malheureusement ce qu’il vit ne le rassura en rien. Les hommes portaient des chapeaux et des gabardines, les femmes étaient vêtues de jupes amples qui leur arrivaient sous le genoux et leurs têtes s’ornaient de foulards ou de coiffures désuètes qui lui rappelaient étrangement l’après-guerre. Profitant d’une accalmie, Frank traversa rapidement la rue mais comme il s’approchait de la boutique, il aperçut une jeune femme, qui était habillée normalement et qui contemplait la vitrine avec une perplexité non dissimulée. Il s’arrêta sur le trottoir, le souffle court, et se tournant vers les grandes vitres il remarqua que des vêtements vintage, des sacs à mains et des chaussures étaient exposés sur les présentoirs.
Troublé par l’étrangeté de la situation Frank pénétra précipitamment dans la boutique et s’il y retrouva Carol, comme il l’espérait, au lieu de vêtements il y découvrit des livres. La jeune femme qu’il avait croisée dans la rue était rentrée derrière lui et secouant la tête, elle s’exclama en riant: » C’est étrange, je pensais qu’un nouveau magasin de vêtements venait de s’ouvrir et je me retrouve dans une librairie! «
Frank était un ancien officier de police, un homme terre à terre qui ne croyait qu’en ce qu’il voyait, aussi quand il raconta son histoire, personne ne la mit en doute. En effectuant quelques recherches, il découvrit qu’autrefois Cripps était le nom d’une boutique de prêt à porter féminin sur Bold Street, exactement à l’endroit où se trouvait maintenant la librairie Waterstones, et que Cardin était celui d’une société réputée de Liverpool, laquelle possédait alors de nombreuses fourgonnettes estampillées à son nom. Alors, et même s’il n’était sur de rien, il se dit que peut-être, pendant quelques minutes, il s’était mystérieusement retrouvé plongé dans le passé.
Le Déjeuner sur Bold Street
Dans les années 1980, une femme travaillait dans le centre-ville de Liverpool et les jours où le temps était agréable elle sortait toujours prendre son repas de midi à l’extérieur. Un jour où il faisait particulièrement chaud, elle choisit de s’asseoir sur un banc juste en face de la librairie Waterstones de Bold Street mais à peine était-elle arrivée que le soleil commença à perdre son éclat et bientôt il devint si terne qu’elle finit par se demander si une éclipse n’était pas en train de se produire. Elle sortit son sandwitch de son sac et tournant distraitement son regard vers la rue, elle remarqua que les trottoirs s’étaient brusquement vidés, ce qui lui parut inhabituel car de nombreux employés sortaient déjeuner à cette heure de la journée.
La femme s’était assise à côté d’un homme très bien habillé et quand elle commença à déballer son sandwich, il engagea la conversation. Ils bavardèrent pendant un moment de questions sans importance et la pensée lui vint que cet homme était fort agréable mais que ses manières et ses vêtements semblaient d’une autre époque. En fait, il semblait tout droit sorti d’un film policier des années 1950.
Puis, comme ils continuaient à discuter, l’inconnu lui posa une question et elle lui répondit tout en se penchant pour jeter l’emballage de son sandwich dans la poubelle près du banc mais quand elle se redressa, il avait disparu. Elle balaya la rue du regard, cherchant sa silhouette en vain, puis brusquement le soleil recouvra son éclat originel et les trottoirs, qui étaient pratiquement déserts quelques secondes plus tôt, retrouvèrent leur animation coutumière.
Le Voyage dans le Temps de Sean
En 2006, Sean Wiggins était un petit délinquant de dix-neuf ans bien connu des services de police, lesquels l’avaient maintes fois arrêté pour possession de drogue et vol à l’étalage. Un jour, alors qu’il venait de dérober quelque chose dans un magasin du centre-ville de Liverpool, Sean se fit surprendre par un agent de sécurité qui le prit en chasse sur Hanover Street. Le jeune homme courait aussi vite qu’il le pouvait, cherchant à semer son poursuivant sans y parvenir, quand il aperçut une ruelle et s’y précipitant il réalisa tardivement qu’il venait de rentrer dans Brooks Alley, une rue sans issue. Une étrange oppression lui comprima la poitrine, comme si l’atmosphère était brusquement devenue plus pesante, et se sachant coincé Sean se retourna, se préparant à l’inéluctable. Il s’attendait à ce que l’agent de sécurité surgisse d’un moment à l’autre mais inexplicablement, jamais il n’arriva.
Au bout d’un certain temps, pensant le danger écarté, Sean ressortit de la ruelle mais quand il s’engagea sur Hanovre Street, tout lui parut différent. Il ne reconnaissait aucune voiture, les passants lui paraissaient habillés bizarrement et même le revêtement de la route semblait avoir changé. Les travaux d’aménagement de la Big Dig, l’entreprise de travaux publics de la ville, s’étaient mystérieusement volatilisés, tout comme les feux de signalisation de Bold Street et juste à côté du lycée, là où aurait du se trouver le café Prohibition, prospéraient maintenant des buissons. Sean se sentait comme un étranger dans la ville mais luttant contre l’angoisse qui tentait de s’insinuer en lui, il remonta son capuchon sur sa tête et se mêla à la foule.
Tous les endroits qu’il traversait lui semblaient si irréels qu’il avait l’impression de marcher dans un rêve et peu à peu il en vint à se demander s’il n’avait pas été transporté dans le passé. Le jeune homme, qui cherchait à se rassurer, eut alors l’idée de sortir son téléphone portable mais quand il découvrit qu’il n’avait plus de réseau, alors brusquement la panique le submergea. Il continua à avancer pendant quelques mètres, les yeux rivés sur l’écran, et comme il n’arrivait pas à capter le moindre signal, il finit par ranger le téléphone dans sa poche, les mains moites et la raison vacillante.
Il venait de s’engager dans Ranelagh Street, près de la gare centrale, lorsqu’un kiosque à journaux attira son attention et se précipitant vers lui, il lut fébrilement la date écrite en haut du Daily Post. 18 mai 1967. Son corps se recouvrit brusquement d’une sueur glacée et Sean se mit à courir vers Brooks Alley, où toute cette histoire avait commencé. Il voulait retourner à son époque. Ses parents l’avaient renié depuis longtemps mais il avait trois bons amis, qui étaient devenus sa famille et qu’il voulait revoir.
Soudain, alors qu’il arrivait devant une bijouterie, son portable résonna d’un bruit familier et le sortant précipitamment de sa poche Sean constata avec soulagement qu’il venait de se rebrancher sur le réseau. La rue, les immeubles, les voitures et les passants avaient tous retrouvé leur aspect habituel, mais quand il se retourna pour regarder vers le bas de Ranelagh Street, d’où il venait, il s’aperçut que les gens étaient toujours habillés dans le style des années 1960. Alors, comme il n’avait aucune envie de s’attarder sur ce mystère, il prit le chemin de Brownlow Hill pour y prendre le bus et rentrer chez lui.
Au cours des jours suivants Sean raconta plusieurs fois l’histoire à ses proches sans jamais en changer un seul détail. Il avait eu peur et quand il en parlait, l’émotion étranglait sa voix. Sa mésaventure finit par attirer l’attention des journalistes qui parvinrent à retrouver l’agent de sécurité qui l’avait coursé et quand ils l’interrogèrent l’homme leur affirma que Sean s’était littéralement volatilisé dans le cul-de-sac.
Imogen et le MotherCare
Au printemps 2011, Imogen, une jeune fille de dix-sept ans originaire de Garston, décida de se rendre à Liverpool pour acheter un petit quelque chose pour sa sœur aînée Abigail qui venait d’être maman. En arrivant au centre ville, la jeune fille fut agréablement surprise de constater qu’un nouveau magasin MotherCare venait de s’ouvrir à l’angle de Lord Street et de Whitechapel et elle s’empressa d’y rentrer. Imogen se promena un long moment dans les rayons et constatant que les prix étaient incroyablement bas elle choisit une barboteuse à pois, de petites mitaines, un cardigan rose en velours, et de nombreux autres articles avant de se diriger vers la caisse. L’anormalité du prix des articles exposés auraient du l’alarmer mais elle se disait que le magasin faisait probablement des promotions pour son ouverture, et elle était ravie de sa bonne fortune.
En arrivant à la caisse, Imogen sortit sa carte de crédit et elle la tendit à la vendeuse mais au lieu d’encaisser ses achats comme elle aurait du le faire, la jeune femme regarda suspicieusement la carte et elle s’empressa d’aller chercher sa responsable pour la lui montrer. La femme mit ses lunettes, elle observa longuement le petit morceau de plastique en plissant les yeux, puis secouant la tête, elle la rendit à Imogen d’un air contrit: » Nous ne prenons pas ça très chère. «
Imogen, qui avait une petite somme d’argent sur elle, décida de payer en liquide puis elle prit ses articles et sortit du magasin. Quand elle arriva chez elle, pour l’heure du thé, la jeune fille raconta à sa mère que pour une obscure raison, le nouveau magasin MotherCare qui venait de s’ouvrir sur Lord Street avait refusé sa carte bancaire. Debbie, sa mère, la regarda un moment sans rien dire puis elle lui répondit qu’autrefois il existait bien un MotherCare à l’angle de Lord Street mais qu’il était fermé depuis des années. » Eh bien, il est de retour, » insista Imogen sans se démonter. Levant les yeux au ciel, sa mère lui expliqua que son histoire était impossible car à cet endroit se trouvait son agence bancaire, la HSBC, et qu’elle aurait forcément été prévenue si elle avait changé d’adresse.
Alors, comme Imogen et sa mère ne pouvaient se mettre d’accord, elles décidèrent d’aller vérifier dès le lendemain et quand elles arrivèrent à l’angle de Lord Street, la jeune fille constata à sa grande surprise qu’à la place du magasin MotherCare, où elle avait fait ses courses la veille, se trouvait maintenant une agence bancaire, comme sa mère le lui avait affirmé. Troublée, Imogen se dit alors qu’elle avait peut-être fait un voyage dans le temps. Cette pensée ne la rassurait guère mais elle expliquait pourquoi sa carte avait été rejetée par le personnel du MotherCare et pourquoi les prix ressemblaient à ceux pratiqués dans les années 1980.
La Voiture du Futur
Un soir de 1957, Geoff Kingsley, un homme de quarante-quatre ans, roulait dans les environs de Liverpool quand soudain, vers 23h45, il remarqua dans le rétroviseur de sa Morris Minor quelque chose qui se rapprochait de lui à grande vitesse et qui l’inquiéta. Une fois arrivé à sa hauteur le véhicule, qui ressemblait à un triangle doré aux bord arrondis, le doubla à une telle vitesse que sa Morris Miror se retrouva brusquement poussée sur le côté par le déplacement d’air.
L’étrange voiture s’engouffra ensuite dans le tunnel Queensway et soudain elle se volatilisa, laissant derrière elle des traces de dérapage sur le bitume. Cette observation fut rapportée par une douzaine de personnes et en l’absence de toute explication certains supposèrent qu’elle avait tout simplement emprunté un portail pour retourner à son époque.
Le Moulin de Thingwall
Un jour où il faisait particulièrement beau Mme P., qui venait de déménager à Thingwall et qui ne connaissait pas encore la région, mit sa fille de quatre ans et demi dans une poussette puis elle partit la promener. L’enfant ne se sentait pas très bien et sa mère espérait qu’un peu d’air frais la soulagerait. En arrivant à Mill Lane, juste en face de l’école primaire, Mme P. constata que la route goudronnée laissait brusquement la place à des pavés et curieuse de voir où ils la mèneraient, elle décida de les suivre. Elle avançait tranquillement, progressant sans grande difficulté malgré la poussette, quand elle remarqua un vieil homme à sa droite, qui portait une chemise sans col et fumait la pipe appuyé contre la porte d’un chalet. En passant devant lui, Mme P. lui fit poliment un signe de la tête et l’homme hocha la sienne en retour.
Un peu plus loin sur la même route elle découvrit des maisons de pierres blanches ornées de paniers de fleurs, un parterre circulaire, un tas de gravas puis quelques chalets, et soudain une femme apparut, qui était habillée d’un chemisier à col châle et d’une longue jupe noire et qui se hâtait de rentrer chez elle. La femme ne semblait pas l’avoir remarquée mais en passant devant sa porte Mme P. put sentir la chaleur de son foyer.
Au bout de la rue, un grand portillon de bois fermait le passage et une fille était assise dessus, qui la regardait s’approcher. A l’époque, La Petite Maison dans la Prairie passait à la télévision et Mme P. se dit qu’avec sa robe-tablier et ses bottines à boutons la petite fille était habillée exactement de la même façon que celles du feuilleton. La fillette la regarda bizarrement et sautant précipitamment de la barrière elle courut se réfugier dans un chalet. Mme P. s’avança jusqu’au portillon et comme la route n’allait pas plus loin, devant elle s’étirait une pente herbeuse qui menait à une prairie, elle décida de faire demi-tour. Sur le chemin du retour elle revit le vieil homme, qui fumait toujours sa pipe, et quand elle lui fit un signe, il lui répondit d’un clin d’œil.
En rentrant chez elle, Mme P. raconta à sa mère qu’elle avait fait une délicieuse promenade dans la vieille ville et quelques mois plus tard, elle lui proposa de visiter l’endroit dont elle lui avait parlé. Malheureusement, quand les deux femmes arrivèrent devant l’école, Mme P. constata que tout avait changé. D’une étrange manière la route avait été goudronnée, le chalet du vieil homme qui fumait une pipe semblait abandonné depuis des années, toutes les maisons de pierres blanches avaient disparu, laissant la place à deux villas mitoyennes, et au bout de la rue, là où elle avait vu la fillette assise sur le portillon, se dressaient maintenant de nombreux bungalows. Sidérée, Mme P. fit remarquer à sa mère qu’il était impossible que toutes ses maisons aient été construites aussi rapidement mais comme elle n’avait aucune autre explication à lui proposer les deux femmes retournèrent chez elles sans savoir quoi en penser.
Huit ans plus tard, Mme P. se retrouva impliquée dans une querelle de voisinage pour une histoire de sentier et son avocat lui suggéra de se procurer d’anciens plans de la ville afin de vérifier les limites exactes de sa propriété. Suivant ce conseil, Mme P. réussit à obtenir les plans de 1830, mais quand elle voulut les examiner, elle eut beaucoup de mal à se situer. Elle finit par repérer l’église de Woodchurch, puis Thingwall Village, et décryptant peu à peu la carte elle découvrit avec stupéfaction que les bâtiments indiqués correspondaient à ceux qu’elle avait vus le jour où elle était sortie promener sa fille. Le tas de gravats qu’elle avait remarqué se trouvait exactement à l’emplacement du moulin de Thingwall, lequel avait été gravement endommagé par un ouragan en 1897.
Sources: The Liverpool Echo etc…