En 1990, après une séance de Ouija brusquement interrompue, Estefanía Gutiérrez Lázaro s’est retrouvée harcelée par des silhouettes sombres qui l’ont menée à la mort. Quelques mois plus tard, ses parents ont appelé la police, affirmant que depuis la disparition de leur fille, leur maison était le théâtre d’une multitude de phénomènes étranges. Le film Véronica, de Placo Plaza, retrace fidèlement cette histoire.
La Séance de Ouija
En mars 1990, à Madrid, en Espagne, le père de Concepción Lázaro agonisait depuis des mois, l’esprit au bord de la folie, quand brusquement, le jour sa mort, il promit à sa fille de lui rendre la vie impossible. Mme Lazaro et sa famille étaient habitués aux divagations du vieil homme, qui les agressait et les insultait sans cesse, mais pour une obscure raison ces paroles jetèrent un voile sombre sur le cœur de la pauvre femme, qui ne put les oublier.
Une semaine plus tard Estefanía, la fille de Concepción et de Máximo Gutiérrez, se trouvait dans la cour de son lycée et elle se livrait à une séance de Ouija en compagnie de quelques unes de ses camarades, tentant vainement de rentrer en contact avec le petit-ami de l’une d’entre elles qui était mort dans un accident de moto, lorsqu’un professeur les surprit et confisquant la planche Ouija et le verre qui leur servait de planchette, il leur ordonna de retourner immédiatement en classe. Les jeunes filles se relevèrent à contrecœur, le suppliant de leur rendre la planche qu’elles avaient fabriquées elles-mêmes en collant les lettres de l’alphabet sur un morceau de carton, mais ignorant leurs cris de protestation il la brisa en deux puis il lança le verre aussi loin qu’il le pouvait. En retombant sur le sol goudronné de la cour, le verre explosa en une multitude de minuscules éclats et une mince colonne de fumée noire s’en échappa, qui flotta un moment dans les airs avant de s’introduire dans les narines d’Estefanía. Ses amies, qui avaient assisté à la scène, se mirent alors à pousser de longs hurlements épouvantés et stupéfait, le professeur resta figé sans savoir quoi faire.
Estefanía était alors âgée de dix-huit ans, elle participait régulièrement à des séances de Ouija mais jamais elle n’avait été confrontée à un tel phénomène. Peu de temps après, elle se plaignit à ses parents que de grandes silhouettes, sombres et faméliques, venaient la visiter à la nuit tombée. Le soir, quand elle éteignait la lumière de sa chambre, elle les voyait qui l’observaient et parfois les ombres l’entouraient en se tenant par la main, murmurant son prénom et l’invitant à les suivre: » Viens, viens à nous! «
La jeune fille, qui pensait que ces longues silhouettes efflanquées venaient pour l’emporter, en avait tellement peur qu’elle n’arrivait plus à dormir puis brusquement, elle commença à avoir des sortes de crises, perdant le contrôle d’elle-même et se montrant si agressive que personne ne la reconnaissait. Parfois, une force surhumaine semblait lui venir et rentrant dans des rages folles elle déchainait sa fureur contre ses propres frères et sœurs. En d’autres occasions, elle se mettait à parler avec la voix grave et rauque d’un homme et elle proférait les pires des insultes. Estefanía se mit ensuite à convulser, les yeux retournés et l’écume aux lèvres, et s’inquiétant de la voir perdre conscience ainsi, ses parents appelèrent leur médecin de famille, lequel leur conseilla de la faire interner en asile psychiatrique.
Au cours des mois suivants, comme personne ne parvenait à trouver de raison à ses troubles, Estefanía fut envoyée dans différents établissements pour y être examinée, passant de l’un à l’autre en vain. Le 14 août 1991, elle se trouvait à l’hôpital Gregorio Maranon quand elle sombra dans un profond coma et brusquement elle mourut, alors que rien ne le laissait à prévoir. Pour les deux médecins qui examinèrent son corps, les docteurs Pedro Cabeza et Gregorio Arroyo, sa mort avait été soudaine et suspecte aussi une autopsie fut-elle réalisée, ses viscères furent mêmes envoyés à l’Instituto Anatómico Forense pour y être analysés, sans qu’aucune cause ne puisse être trouvée quand à son décès. Alors, en l’absence de tout élément, le Dr Pedro Cabeza écrivit dans son rapport que la mort d’Estefanía Gutiérrez Lázaro était due à un arrêt cardiaque mais loin de se satisfaire de cette conclusion ses parents remirent en question la rigueur de l’autopsie et s’ils parvinrent un moment à susciter l’intérêt des médias, l’affaire fut bientôt oubliée.
La Hantise
Malheureusement, ce qui hantait Estefanía ne disparut pas avec elle. Quelque chose de sombre sembla rester dans la maison, qui se mit à tourmenter ses proches. La première nuit, la voix aigüe d’une femme qui pleurait et criait Maman! Maman! réveilla M. et Mme Gutiérrez qui se précipitèrent dans la salle de bain, d’où elle semblait provenir, sans trouver personne. Peu de temps après, ils entendirent du bruit dans la chambre d’Estefanía, qui était restée inoccupée depuis son départ, et ouvrant rapidement la porte ils découvrirent que toutes ses affaires avaient été bouleversées, jusqu’aux draps et aux couvertures de son lit.
La nuit suivante, des coups résonnèrent dans le couloir, qui de rapprochèrent peu à peu de la chambre à coucher parentale, puis un rire retentit devant la porte, qui ressemblait à celui d’un vieil homme et qui glaça le sang de toutes les personnes présentes. Alors brusquement, toute la maison sembla prendre vie. Des voix s’élevaient de la salle de bain, où la température descendait parfois inexplicablement, les portes des chambres et celles des armoires s’ouvraient et se refermaient violemment, les appareils électriques s’allumaient et s’éteignaient tout seuls, et parfois de petits objets volaient à travers les pièces.
Une nuit, alors qu’elle était couchée dans son lit, Mme Gutiérrez sentit une pression sur son corps et pensant que quelqu’un se trouvait avec eux dans la pièce, elle prévint son mari mais à peine avait-elle terminé sa phrase que deux mains lui attrapèrent les pieds et qu’une troisième se glissa dans la sienne. Au début, elle songea que sa pauvre fille était peut-être venue la réconforter, puis elle prit brusquement conscience de l’étrangeté de la chose et l’horreur la submergea.
Un jour d’automne, toute la famille était rassemblée au salon quand la porte de la pièce s’ouvrit brutalement et des coups commencèrent à résonner dans les murs, qui ressemblaient au martèlement furieux de poings invisibles. Terrifiés, M. et Mme Gutiérrez refermèrent la porte puis ils s’empressèrent de la bloquer avec un gros canapé sur lequel ils posèrent un lourd objet de marbre pour plus de sureté. Le phénomène dura un certain temps mais comme ils espéraient que tout était fini quelque chose de semblable à un ouragan émergea du long couloir étroit, qui tourna le bouton de la porte et pénétra dans le salon, poussant les meubles contre le mur du fond et arrachant les petits objets des étagères sur son passage.
Parmi eux, se trouvait un objet qui avait une plus grande valeur affective que les autres, une photographie d’Estefanía qui souriait à l’objectif, quelques mois avant sa mort. En la voyant à terre, sa mère se précipita pour la ramasser mais quand elle voulut la retourner un cri lui échappa et elle la laissa brutalement retomber sur le planché. Intrigué par la réaction de sa femme, Máximo se penchait pour l’attraper quand il constata avec effroi que le portait se consumait, dévorant le visage de sa fille. D’une étrange manière, le phénomène s’arrêta soudainement après avoir effacé la moitié du visage d’Estefanía de l’image, épargnant le cadre et le reste de la photo.
Des silhouettes sombres commencèrent alors à apparaitre, qui rôdaient dans le couloir ou dans les chambres et se fondaient dans les murs. M. et Mme Gutiérrez en furent si effrayés qu’ils firent installer des alarmes dans toutes les pièces de la maison mais si parfois elles détectaient quelque mouvement, jamais ils ne voyaient personne. Un jour, Máximo jouait avec son fils Maximilian, qui était le plus jeune enfant de la famille, quand soudain il le vit se faire projeter à travers la chambre. Au mois de novembre, Maximilian se rendait à la cuisine pour y chercher une collation lorsqu’il entendit quelque chose siffler dans les airs et se baissant vivement il vit une pointe de bois passer près de lui, qui alla se planter dans un des saucissons suspendus au plafond. Le 24 du même mois, deux de ses sœurs qui partageaient les lits superposés d’une même chambre firent une rencontre qu’elles décrivirent ainsi:
» Ça ressemblait à un coup de sifflet dans le couloir, quelque chose que nous avions déjà entendu d’autres nuits. Tout à coup, nous avons entendu toutes les deux comme une plainte près de la porte. Nous avions tellement peur que nous n’osions ni monter ni descendre. Soudain, nous avons remarqué quelque chose sur le sol. La lumière des lampadaires de la rue venait par la fenêtre, et nous voyions clairement. Nous avons donc vu qu’il y avait quelqu’un d’autre avec nous, et nous avons pensé que nous allions mourir!
Une grande chose, qui rampait sur le sol et qui avait la forme d’un homme, la tête toute noire, sans yeux, sans bouche, sans rien, avançait la poitrine collée au sol, glissant à travers la chambre. Nous avons commencé à crier et juste après, les poupées entassées contre le mur ont commencé à être jetées à l’autre extrémité avec force, une après l’autre, puis brusquement la pièce s’est mise à résonner de coups et de cris.
Quand ils ont ouvert la porte, nos parents nous ont retrouvées recroquevillées chacune dans notre lit, et les poupées dispersées sur le sol, comme si quelqu’un avait joué avec elles pendant des heures. «
Intervention de la Police
La nuit du 27 novembre 1992, à deux heures quarante du matin, Máximo Gutiérrez téléphona au poste de police de Vallecas, à Madrid, et il déclara d’une voix blanche que sa maison était hantée. L’inspecteur José Negri, qui était de garde cette nuit-là, ne crut pas un mot de son histoire, mais Máximo passa ensuite le combiné à sa femme et à ses enfants, et l’officier les trouva dans un état de si grande panique qu’il rassembla rapidement quelques hommes et se mit aussitôt en route.
En se garant devant le petit immeuble résidentiel du numéro 8 de la rue Luis Marin, les policiers remarquèrent avec étonnement que malgré la froideur de cette nuit d’automne, toute la famille les attendait sur le trottoir, visiblement terrifiée. M. et Mme Gutiérrez les conduisirent jusqu’à l’appartement, qui était des plus calmes, puis ils leur proposèrent de s’asseoir autour de la grande table de la salle à manger et ils commencèrent à raconter leur histoire, décrivant la malheureuse séance de Ouija d’Estefanía et ses conséquences, sa mort dans des circonstances troublantes, les phénomènes étranges dont la maison était le théâtre depuis sa disparition et les grandes silhouettes sombres qui erraient dans le couloir et dans les chambres.
L’inspecteur Negri et ses hommes les écoutaient poliment, silencieux et perplexes, quand de manière soudaine et totalement contre nature l’une des portes de la grande armoire s’ouvrit si violemment qu’elle fit des va-et-vient pendant quelques secondes. Soupçonnant quelque stratagème, ils examinèrent soigneusement le meuble sans trouver d’explication au phénomène. Ils ne s’étaient toujours pas remis de leur surprise qu’une forte détonation retentissait sur la terrasse, qu’ils coururent inspecter en vain. Les policiers, dont le scepticisme commençait à vaciller, discutaient des incidents quand une substance marronâtre commença à apparaitre sur le napperon du petit guéridon qui supportait le téléphone. Alors, comme personne ne semblait pouvoir en déterminer l’origine ou la nature, certains émirent l’hypothèse qu’elle était peut-être de l’ectoplasme.
L’inspecteur, qui reconnaissait maintenant l’étrangeté des faits, demanda à visiter toutes les pièces de la maison, ce qui lui fut accordé, et en arrivant dans la chambre d’Estefanía, il découvrit que le crucifix accroché au mur avait été retourné et que le Christ qui lui était attaché avait été arraché. L’un des enfants apparut alors, qui lui expliqua avoir ramassé le Christ qui gisait sur le sol et l’avoir accroché à un clou de la porte la chambre, près d’un poster. Malheureusement, il était aussitôt retombé sur le plancher et telles une silencieuse menace, trois griffures étaient apparues sur l’affiche.
Quand il pénétra dans la salle de bain, qui était au centre de nombreux phénomènes et que la famille n’utilisait plus que comme salle de stockage, l’inspecteur Negri sentit ses cheveux se hérisser sur sa tête et un froid glacial le gela jusqu’aux os. » Un froid comme je n’avais jamais ressenti auparavant, » déclara-t-il.
La conclusion du rapport de police fut la suivante: » … il y a un certain nombre de phénomènes en tous points inexplicables… «
Terrorisés, M. et Mme Gutiérrez finirent par vendre leur maison et ils trouvèrent la paix dans une autre. Aucun phénomène ne fut jamais rapporté par leurs successeurs mais en 2006, un épisode de la série télévisée Cuarto Milenio fut tourné à leur ancien domicile, au 8 de la rue Luis Marin, et à cette occasion l’équipe parvint à enregistrer des voix qui chuchotaient furtivement: » Je ne peux pas » ou » Laisse-la, elle est folle » ou encore ces mots pleins de promesses: » Attention, on a pas commencé… «