Le Fantôme du Grenier

La Maison des Peters à Denvers

En 1941, un vieil homme fut sauvagement assassiné dans sa maison de Denver, au Colorado, et des rumeurs commencèrent à courir qu’un fantôme hantait les lieux, qui était probablement responsable de ce crime.

Le Mystère

En 1941, Philip Peters, un contrôleur de train à la retraite, et sa femme occupaient une modeste maison de l’époque victorienne sur la place Moncrieff, dans le nord de Denver. Malheureusement, Mme Peters avait du être hospitalisée pour une fracture de la hanche deux semaines auparavant et le vieil homme, qui était âgé de 73 ans et n’avait aucun parent dans les environs, se retrouvait seul.

Dans la soirée du 17 octobre, l’une de ses voisines qui l’avait invité à dîner commença à s’inquiéter en ne le voyant pas arriver et sachant qu’il déprimait depuis que sa femme était hospitalisée, elle décida d’aller voir s’il se sentait bien. D’une étrange manière, la maison était plongée dans l’obscurité et lorsqu’elle sonna à la porte, personne ne lui répondit. Brusquement anxieuse, elle réunit quelques habitants du quartier et ensemble, ils retournèrent à la maison, qui était étrangement silencieuse. Pensant que le vieil homme avait peut-être été victime d’un accident, ils essayèrent toutes les portes et toutes les fenêtres, qu’ils trouvèrent fermées, puis une jeune fille remarqua que l’une des vitres était branlante et en la forçant elle réussit à l’ouvrir suffisamment pour se glisser à l’intérieur. Quelques instants plus tard, des cris stridents résonnèrent dans la maison où Philip Peters et sa femme avaient vécu plus de cinquante ans. Le vieil homme était étendu sur le plancher du rez-de-chaussée et visiblement, il avait été assassiné.

Quand les policiers pénétrèrent dans la maison du 3335 West Moncrieff Place, ils découvrirent le corps de Philip Peters, à moitié dévêtu et recouvert de sang, qui gisait en bas des escaliers de sa chambre. Le malheureux avait été roué de coups, plus d’une douzaine de blessures s’ouvraient sur son crâne, et son agresseur, dont il n’avait probablement pas vu le visage, avait visiblement continué à le battre longtemps après sa mort. De l’argent et une montre avaient été laissés en évidence sur une commode, ce qui permettait d’exclure l’hypothèse d’un crime crapuleux, et dans la cuisine deux shakers en fonte étaient posés sur la table, un poussiéreux et un autre qui avait été été nettoyé avec une serviette humide, laquelle avait été abandonnée juste à côté de l’objet, tâchée de sang. D’une étrange manière, toutes les issues étaient verrouillées de l’intérieur et une chaine retenait même la porte d’entrée qui était fermée à clef. Pensant que le meurtrier se trouvait toujours dans la maison, les policiers en fouillèrent toutes les pièces, cherchant un endroit où il aurait pu se dissimuler, sans trouver personne. L’homme avait tout simplement disparu sans laisser de trace.

Quelques mois plus tard, par une journée glaciale de janvier 1942, des enfants passaient devant la maison des Peters, qui était toujours inoccupée, quand soudain ils aperçurent une lumière à l’intérieur. Peu de temps après, une voisine regardait vers le bungalow quand soudain le visage d’un spectre apparut à l’une des fenêtres, qui se fondit dans la pénombre quelques instants plus tard. Des rumeurs commencèrent alors à courir que la maison était hantée par une multitude d’esprits, qui étaient probablement responsables de la mort de ce pauvre M. Peters.

Une fois rétablie de sa fracture à la hanche, Mme Peters, qui ne croyait probablement pas aux fantômes ou qui s’en moquait, décida de retourner dans la maison qui était la sienne depuis si longtemps. Malheureusement, un soir, un bruit la fit sursauter et tombant sur le plancher elle se fractura le fémur. Comme elle ne voulait pas retourner à l’hôpital, la vieille dame engagea une garde-malade, qui s’installa chez elle à plein temps. L’infirmière avait bien entendu les histoires de hantise, mais n’étant pas facilement impressionnable elle n’y avait guère accordé de crédit. Durant son séjour, elle remarqua qu’en journée tout semblait tranquille mais qu’à la nuit tombée, des bruits étranges et des cliquetis résonnaient dans la maison, qui semblaient provenir de l’intérieur des murs. Troublée, elle décida de prévenir la police, qui vint inspecter les lieux sans rien remarquer d’anormal. Un soir, elle se trouvait au rez-de-chaussée quand soudain un fantôme apparut sur les marches de l’escalier, faisant claquer ses dents vers elle et la fixant de son regard sauvage. Terrifiée, la jeune femme s’enfuit sans attendre et elle courut donner sa démission.

Mme Peters, qui était toujours impotente, se retrouvait donc seule, mais une voisine charitable proposa d’en prendre soin le temps qu’elle se rétablisse, poussant le dévouement jusqu’à dormir chez la vieille dame. Une nuit, un bruit bizarre retentit dans la cuisine, la réveillant brusquement, et pensant qu’un intrus s’était introduit dans la maison, elle se précipita dans la pièce sans même allumer la lumière. Un immonde créature, semblable à un mort-vivant, se tenait au pied de l’escalier, et en l’apercevant elle se mit aussitôt à crier, faisant disparaitre la chose. La police, qui avait été prévenue des derniers événements, décida alors de mettre la maison sous surveillance constante, et devant l’insistance de certains de ses parents, Mme Peters consentit à s’installer chez son fils, dans l’Ouest du Colorado.

Une fois la vieille dame partie, la maison resta vide, du moins en apparence, car de nouvelles rumeurs se répandirent que Philip Peters s’était relevé de sa tombe pour hanter son ancienne demeure. Le 30 juillet juillet 1942, deux hommes de la police de Denver étaient stationnés juste en face de la maison des Peters, à l’affût du moindre mouvement. Alors que le soleil commençait à descendre, un facteur s’avança dans la rue et les deux policiers le regardaient distraitement quand soudain l’un d’eux aperçut un visage, qui ressemblait à celui d’un gobelin, apparaitre brièvement dans l’ouverture des rideaux de l’une des fenêtres du bungalow. L’homme donna rapidement un coup de coude à son camarade, qui leva les yeux juste à temps pour apercevoir un mouvement fugace et un frisson le parcourut, qui partit de sa nuque pour finir dans ses tripes. Alors, d’une manière qu’il jugea quelque peu stupide, il ne put s’empêcher de penser que ce genre d’effet était exactement celui que provoquaient les fantômes.

Les deux hommes descendirent de leur voiture et pendant qu’ils traversaient la rue en courant l’un d’eux porta son sifflet à sa bouche pour appeler des renforts. Quand leurs épaules s’écrasèrent contre la porte d’entrée, qui s’effondra rapidement, la silhouette avait disparu de la fenêtre. A l’intérieur, les meubles étaient enveloppés dans des journaux, de vieux magasines s’étalaient sur la table et une vieille photographie trônait sur un piano, qui montrait un jeune homme malingre tenant une mandoline à la main. Les policiers commencèrent par fouiller le rez-de-chaussée, et leurs poils se hérissèrent alors qu’ils traversaient les différentes pièces, où flottait une épouvantable odeur. Puis, comme ils grimpaient les escaliers pour monter au premier, ils remarquèrent que la porte d’un placard se refermait doucement et se précipitant pour l’ouvrir, ils aperçurent deux pieds nus suspendus au plafond, qui battaient l’air violemment.

Au-dessus de ces pieds, pendait ce qui semblait être le plus vieux pantalon du monde et tendant le bras, un policier réussit à en attraper une jambe mais elle se déchira, lui abandonnant un morceau de tissu crasseux dans la main. Comprenant qu’il devait s’y prendre d’une autre manière, il tenta alors d’agripper l’un des pieds et quand il y parvint, il s’y accrocha aussi fort qu’il le pouvait. Derrière lui, son partenaire le regardait mais le cagibi était si petit qu’il ne pouvait y rentrer pour l’aider. Puis, comme la situation semblait s’éterniser, le policier tordit violemment la cheville du fuyard et un cri de douleur s’éleva du grenier, mais personne n’en descendit. Cinq minutes plus tard, un vagabond aux vêtements en lambeaux s’effondra sur le plancher, qui n’était plus que l’esquisse d’un être humain. En luttant contre l’officier de police il s’était évanoui et il gisait sur le sol, atrocement sale et abominablement maigre, semblant pouvoir mourir à tout instant.

Le trou par lequel il venait de tomber faisait trois fois la taille du couvercle d’une boite à cigares et personne n’aurait pu y passer, sauf lui. Au cours de l’enquêteAperçu sur l’assassinat de M. Peters les enquêteurs avaient remarqué la trappe mais elle était tellement étroite qu’ils n’avaient jugé nécessaire de l’inspecter. Un policier tenta de s’y glisser sans y parvenir mais passant sa tête par l’ouverture il put observer la petite pièce sous les combles qui était, selon sa description, à peine plus large qu’un cercueil. Une petite ampoule à incandescence était suspendue à un fil dans les chevrons, qui éclairait un plancher rempli d’ordures et d’excréments, et une terrible odeur remplissait l’air. Une vieille planche à repasser était posée sur le sol, qui servait apparemment de lit à celui qui occupait l’endroit, et des lambeaux de magasines recouvraient les murs, tels de sinistres guirlandes. Quand l’homme reprit connaissance, il fut emmené au poste où des policiers lui proposèrent immédiatement à manger et pendant qu’il se restaurait, il leur raconta son incroyable histoire.

L’Histoire de Theodore Coneys

Theodore Coneys

L’homme qui habitait le grenier de la maison des Peters s’appelait Theodore Coneys, et il était né le 10 Novembre 1882 à Petersburg, dans l’Illinois. Durant son enfance, le jeune garçon avait souffert d’une si mauvaise santé que les médecins lui avaient toujours dit qu’il ne fêterait jamais son dix-huitième anniversaire, ce qui l’avait amené à négliger ses études. A dix-sept ans, le jeune homme ne travaillait pas, sa mère s’y opposait du fait de sa fragilité, mais il donnait parfois des cours de mandoline au Mandoline Club, un endroit à la mode, et il était plutôt doué.

En 1899, Philip Peters et sa femme venaient d’acheter une petite maison située dans une rue tranquille de Denver quand un soir, passant devant chez eux, Theodore avait entendu de la musique. Intrigué, le jeune homme à la mandoline s’était arrêté et regardant à travers les rideaux de la fenêtre du salon, il avait vu ce couple si heureux qu’une bouffée de jalousie l’avait brusquement submergé. Alors, sans vraiment savoir pourquoi, il s’était arrêté sous le porche et il avait sonné à leur porte. Au cours des mois suivants, M. et Mme Peters lui avaient proposé de diner avec eux à de nombres reprises, et Theodore avait toujours accepté. Lors de ces différentes soirées, le jeune homme leur avait raconté son enfance dans l’Illinois, ses problèmes de santé et la mort de son père, mais il leur avait également fait part de ses états d’âme, leur confiant que souvent les gens se moquaient de lui en le voyant, qu’il en était venu à les détester et qu’il avait envie de s’enfuir quelque part, loin de tous ces regards qui le jugeaient.

Quelques années plus tard, un soir de neige, alors que Phil Peters partait au travail, il avait heurté une silhouette élancée, et immédiatement il avait reconnu le jeune homme maladif qu’il recevait autrefois. Theodore lui avait alors raconté que des hommes avaient conseillé à sa mère de vendre leur propriété dans l’Illinois et d’investir dans une une mine, qu’elle les avait écoutés mais qu’ils n’avaient jamais revu la couleur de leur argent. Depuis, il travaillait dans la publicité et il prenait soin de sa mère. Touché par son histoire, M. Peters, qui était de l’avis de tous un homme d’un extrême bonté, l’avait alors invité à diner.

Au printemps 1912, Philip Peters avait croisé Theodore Coneys une nouvelle fois et ce dernier lui avait parlé de la mort de sa mère, lui expliquant que depuis, il ne savait pas quoi faire de sa vie. Lors de cette discussion, Theodore n’avait pas osé lui avouer qu’il avait cherché à rentrer dans l’armée, que sa démarche avait provoqué l’hilarité générale, et qu’il était devenu un clochard fatigué, qui dormait sous les ponts et toussait sans cesse. Au cours des années suivantes, il avait dérivé d’état en état, travaillant pendant un temps comme vendeur à New York, puis y renonçant et retournant à Denver. En septembre 1941, Theodore avait eu besoin d’une attestation de résidence, et il avait alors eu l’idée d’en demander une à Philip Peters, qui s’était toujours montré bon envers lui.

 » Je suis arrivé dans le quartier en septembre 1941. J’ai trouvé la maison déverrouillée et personne à l’intérieur. Je suis rentré, et j’ai volé un peu de nourriture. Je n’étais pas en forme, mes poumons me faisaient terriblement souffrir et j’étais au bout du rouleau. L’automne approchait, et je ne pouvais pas affronter un nouvel hiver sur la route, je devais trouver un endroit où rester.

Je ne savais pas que Mme Peters était à l’hôpital. J’ai trouvé le trou dans le placard, j’ai grimpé et j’ai dormi, j’ai dormi… Chaque fois que j’entendais du bruit en bas, je ne bougeais plus. Puis je suis devenu plus audacieux, et j’ai utilisé la pénombre pour me faufiler derrière lui de pièce en pièce. C’était une sorte de jeu, et il me faisait frissonner. C’était la première fois que j’avais quelqu’un à ma merci, mais je ne voulais pas lui faire de mal. Ce grenier était misérablement chaud en été, et mes pieds se figeaient de froid en hiver, mais ça faisait partie du prix que j’étais prêt à payer.

Je ne peux pas vous dire pourquoi j’y suis resté. Je suppose que c’était tout un monde pour moi. J’avais l’habitude d’aller en bas et de regarder le facteur approcher. Personne ne m’a jamais écrit en 25 ans. Chaque fois que je voyais des gens dans la rue, je les détestais et je retournais dans mon grenier.

Tout aurait bien été et Phil Peters serait en vie aujourd’hui s’il ne m’avait pas surpris à voler la boite de glace. C’était lui ou moi. Je pensais qu’il était sorti, mais il faisait une sieste. Je l’ai frappé avec le shaker en fonte quand il a essayé de courir pour demander de l’aide. Je ne sais pas s’il m’a reconnu. Cela faisait près de 30 ans qu’il ne m’avait pas vu. Une fois terminé, j’ai couru au grenier après avoir lavé et séché le shaker. J’étais assis sur la trappe lorsque vous avez tapé contre elle le soir où vous l’avez trouvée. « 

Après sa confession, l’histoire de Theodore Coneys fit la une des journaux, qui le surnommèrent The Denver Spiderman, l’Homme-Araignée de Denver, à cause de ses longs doigts minces et de ses manières étranges. Theodore fut condamné à la prison à vie au pénitencier de Canon City, et selon certains, il y aurait été heureux.

Theodore Coneys
Theodore

 » Cet homme pâle d’un mètre soixante-dix-sept et de 62 kilos avait maintenant  soixante ans passé, et il était assis dans une pièce spacieuse, du côté ensoleillé d’un bâtiment rébarbatif. Il y avait un haut mur extérieur le long duquel des hommes armés marchaient. Il y avait des barreaux aux fenêtres et des centaines de livres sur des étagères autour de lui.

Il était propre, ses cheveux avaient été coupés et il avait pris du poids. Cette pièce était la bibliothèque du pénitencier de Canon City. Les doigts d’araignée, longs et minces, qui avaient autrefois pincé les cordes d’une mandoline étaient ceux du bibliothécaire de la prison. Il ne se pressait pas pour atteindre les livres alors qu’il purgeait sa peine à perpétuité. Il était maintenant dans sa nouvelle jungle, à l’abri des assauts du monde qu’il détestait.

Theodore Edward Coneys, qui était aussi connu comme Matthew Cornish, avait trouvé son endroit. Il était entré dans la prison le 18 Novembre 1942 et il est mort à l’hôpital de la prison le 16 mai 1967. « 

Sources: Oddly Historical etc…

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