Dans le Rhode Island, les gens croient aux vampires. Derrière la petite église de Chestnut Hill, dans la ville d’Exeter, se trouve la tombe Mercy Brown, la vampire le plus célèbre de la Nouvelle-Angleterre. Si le cœur de la présumée vampire a été réduit en cendres depuis longtemps, ceux qui osent pénétrer dans le petit cimetière au cours de la nuit en reviennent parfois avec des histoires effrayantes. Je vous propose de découvrir la tragique histoire de Mercy Brown.
George T. Brown, un fermier respecté de sa communauté, sa femme Mary Eliza et leurs cinq enfants vivaient dans la petite ville d’Exeter, dans le Rhode Island. Mais en 1883, Mary Eliza contracta la tuberculose et elle mourut le 8 décembre, à l’âge de 36 ans. Moins de six mois plus tard, le 6 juin 1884, Mary Olive, l’ainée des enfants, succombait de la même manière.
Sept ans plus tard Edwin, le fils unique de George, un jeune homme de 24 ans qui travaillait comme commis de magasin, commença à montrer les premiers signes de la maladie. Espérant qu’un changement de climat lui serait bénéfique, Edwin partit s’installer au Colorado, dont les eaux étaient réputées pour soigner la tuberculose, et sa femme le rejoint peu de temps après. Malheureusement, vers la fin de l’année 1891, son état de santé s’était terriblement dégradé, et Edwin retourna à Exeter. Sa jeune sœur Mercy, alors âgée de 19 ans, fut alors victime d’une forme fulgurante du même mal et le 18 janvier 1892, la vie la quittait. Comme elle était morte en plein hiver il fallait attendre le dégel pour que sa tombe officielle puisse être creusée et en attendant, son corps avait été déposé dans une crypte non loin des siens, au cimetière de Chestnut Hill.
Peu de temps, un villageois rapporta avoir vu Mercy marcher dans le cimetière et les champs environnants et Edwin Brown, le propre frère de Mercy, affirma que sa sœur revenait la nuit » s’asseoir sur sa poitrine » afin de l’étouffer. Les nombreux décès qui avaient accablé la famille Brown avaient déjà fait naitre la suspicion dans bien des esprits et ces témoignages confirmèrent les doutes des villageois: un vampire s’était relevé de sa tombe pour tourmenter les vivants. A chacune de ses visites il volait à ses victimes un peu de leur force vitale, les entrainant inexorablement vers la mort et les transformant en vampires.
Les voisins de George vinrent alors le trouver pour lui suggérer de faire quelque chose. George, qui était un homme pragmatique, ne croyait pas en ces superstitions mais il n’avait pas vraiment le choix. Il devait veiller sur ses deux filles et s’il voulait qu’on les laisse en paix, il se devait d’obtempérer. Au début du mois de mars, il fit parvenir un message au Dr Harold Metcalf, un médecin de Wickford, lui demandant de venir pratiquer une autopsie et le 17 mars, accompagné de son fils et de fonctionnaires de la ville, il se rendit au cimetière.
Ce jour-là, ils exhumèrent trois cadavres: celui de la mère de Mercy, celui de sa sœur, et enfin celui de Mercy. Les deux premiers corps étaient dans un état de décomposition avancé, il ne restait plus que des ossements, ce qui était prévisible vu que les deux femmes étaient mortes depuis près de dix ans. Mais lorsque les hommes ouvrirent le cercueil de Mercy, ils s’aperçurent que son corps avait changé de position et qu’il était en excellent état. Son visage était rouge, ses cheveux et ses ongles avaient poussé et ses veines semblaient gorgées de sang frais. Ces constations conduisirent les membres du groupe à ouvrir sa cavité thoracique afin d’examiner ses entrailles. Lorsque le Dr Metcalf fit une incision dans son cœur, un liquide vermeil s’écoula. Persuadés d’avoir découvert le vampire, ils lui arrachèrent le cœur et le brulèrent immédiatement sur une pierre à proximité. Puis les cendres furent ensuite mélangées à de l’eau et données à Edwin car l’on pensait alors alors que si la victime d’un vampire ingérait les restes de son cœur, le charme était rompu. En dépit de ces mesures désespérées, Edwin mourut moins de deux mois plus tard, le 2 mai 1892.
Lorsqu’il fut connu, l’événement causa un réel émoi. Les journalistes parlèrent de vampire et de tradition européenne mais certains journaux, comme le Providence Journal, écrivirent que l’idée d’exhumer un corps et d’en brûler le cœur était un acte barbare. Lorsque Bram Stoker, qui écrivit Dracula en 1897, mourut, des articles de journaux sur l’exhumation de Mercy Brown furent retrouvés dans ses papiers. L’histoire de Mercy est également mentionnée dans la nouvelle The Shunned House de HP Lovecraft.
Depuis, la plupart des visiteurs du petit cimetière disent sentir une présence près de la tombe de Mercy Brown et beaucoup se sentent observés. De nombreux témoins ont rapporté avoir vu le fantôme de Mercy se promener dans le cimetière au clair de lune, d’autres affirment avoir entendu les pleurs d’une jeune femme ou avoir vu une lueur bleue briller près de sa pierre tombale. En 1984, Lewis Everett Peck, un descendant de la famille Brown alors âgé de 51 ans, racontait au Providence Journal l’étrange spectacle auquel il avait assisté dans les années 60 alors qu’il regardait vers les tombes de ses ancêtres:
» J’étais âgé d’environ 18 ou 19 ans quand cette chose a eu lieu. Nous avions eu un Model A… et j’étais allé derrière l’église Chestnut Hill avec mon frère David. Alors que nous regardions -vers la concession familiale- nous avons vu une grande et grosse boule de lumière si brillante qu’elle en était bleue. Dieu qu’elle était claire, c’est ce genre d’image qui reste gravée en vous. Je ne sais pas de quoi il s’agissait. Et pour vous répondre sur ce qui s’est passé par la suite, je ne sais pas nous ne sommes pas restés. «
De nos jours encore, nombreux visiteurs viennent régulièrement visiter la tombe de Mercy Brown, y déposant parfois des dents de vampire en plastique ou des bijoux. Une légende raconte que si vous vous cachez derrière sa pierre tombale au moins d’octobre, par une nuit où brille la lune et que vous regardez sa tombe par le haut de la stèle, alors vous aurez peut-être la chance d’apercevoir Mercy lors de l’une de ses promenades fantomatiques à travers le cimetière. Pour les plus audacieux, il existe une autre version qui prétend que si l’on frappe trois fois sur sa tombe en disant: » Mercy L. brown, es-tu un vampire? « , alors Mercy apparaitrait pour vous, et pourrait même vous parler si l’envie lui en prend.
Si l’histoire de Mercy Brown est la plus célèbre des histoires de vampires du Rhode Island, elle n’est pas la seule. Au cours du 17e siècle, la Nouvelle-Angleterre connut une véritable hystérie vampirique. Durant cette période, les corps de plus de 100 personnes soupçonnées de vampirisme furent exhumés, et le Rhode Island fut surnommé La Transylvanie d’Amérique du Nord. Nellie Louise Vaughn était l’une d’entre elles. Nellie Vaughn, qui habitait West Greenwish, dans le Rhode Island, perdit la vie le 31 mars 1889, à l’âge de 19 ans, d’une pneumonie. La suite de l’histoire tient de la légende, car les faits ne sont pas vérifiables. Après sa mort, de nombreux décès auraient endeuillé sa famille, ce qui aurait conduit à l’exhumation de son corps et à la crémation de son cœur.
Quoi qu’il en soit, dans les années 1970, elle avait toujours la réputation d’être un vampire, et cette réputation attirait les curieux qui venaient visiter sa tombe située dans le petit cimetière de l’église baptiste. Sur sa pierre tombale, ces quelques mots énigmatiques faisaient frissonner ses visiteurs: » Je t’attends et je te regarde « .
En 1977, un journal rapportait qu’un professeur d’université locale avait souligné cet étrange fait: » Aucun lichen et aucune végétation ne se développent sur la tombe » et l’on disait que l’esprit agité de Nellie se faisait parfois entendre, sentir ou voir dans le vieux cimetière.
Au cours de l’été 1993, Marlene Chatfield, qui habitait Coventry, rapporta qu’elle avait rencontré Nellie à plusieurs reprises alors qu’elle faisait des frottements sur des tombes. Quand elle avait tenté de faire une impression de la stèle de Nellie, son papier avait été ruiné par des taches d’humidité mystérieuses alors que la pierre était complètement sèche. Puis son charbon de bois avait disparu. Alors que toutes ses photos étaient réussies, les photos de la tombe de Nellie étaient inversées.
Quand Marlene retourna au cimetière avec son mari, en aout 1993, l’esprit se manifesta de manière bien plus explicite. Son mari se trouvait près de la tombe de Nellie quand il entendit une voix de femme lui dire très clairement: » Je suis tout à fait agréable « . Son visage se serait ensuite couvert de rayures rouges, ce qui l’aurait incité à quitter les lieux au plus vite.
Cet événement n’allait pas décourager Marlene. En septembre 1993, elle engagea la conversation avec une jeune femme qui lui dit appartenir à une société d’histoire locale. Inévitablement, elles en vinrent à parler de Nellie et de la légende du vampire mais la jeune femme devint brusquement agitée et se mit à répéter à plusieurs reprises: » Nellie n’est pas un vampire « . Agacée, Marlene s’excusa et se dirigea vers sa voiture. Quand elle regarda derrière elle, la femme avait disparu.
Alors qu’ils visitaient le cimetière, des promeneurs auraient aperçu une femme habillée comme à l’époque victorienne. Elle aurait disparu alors qu’ils s’approchaient. D’autres rapportaient avoir vu une femme planant dans les airs au-dessus de la tombe de Nellie. Elle tirait nerveusement sur ses cheveux. Comme le mari de Marlene, de nombreuses personnes auraient entendu une voix féminine désincarnée affirmer qu’elle était » parfaitement agréable « . Ils n’auraient pas eu à subir les effets secondaires.
Cependant, la nature vampirique de Nellie serait une légende. L’un de ses contemporains interrogé sur le sujet avait affirmé que jamais, de son vivant ou après sa mort, il n’avait été question de vampire à propos de Nellie. La méprise viendrait des années 1960. Une professeur du lycée de Coventry aurait dit à ses élèves qu’un vampire était enterré dans le cimetière près de la route 102. Elle pensait, bien évidemment à Mercy Brown, mais elle voulait que ses étudiants la découvrent par eux-mêmes, aussi ne leur avait-elle donné que son âge. Quand ils découvrirent la pierre tombale de Nellie, ils notèrent son âge et l’étrange inscription et ils en conclurent qu’ils avaient trouvé le vampire. De plus, alors que l’histoire de Mercy est fort bien documentée et ce dès l’instant de son exhumation, il est impossible de trouver un quelconque document insinuant que Nellie fut soupçonnée de vampirisme après sa mort.
Les pierres tombales des deux jeunes filles ont été vandalisées et volées à plusieurs reprises. Le phénomène a atteint une telle ampleur que la pierre tombale de Nellie a été enlevée par la mairie. A la place, se trouve aujourd’hui une herbe verdoyante.