En novembre 1992, après de nombreuses années d’une vie chaotique, Debra épousa Tony Pickman, l’homme qui allait lui apporter le bonheur qu’elle espérait. A ce moment là, la jeune femme était déjà enceinte de trois mois et comme les jeunes mariés prévoyaient de fonder une famille, ils cherchaient une maison assez grande pour accueillir leurs trois chats, leur chienne Sasha et leurs futurs enfants. Après plusieurs visites infructueuses, l’un des frères de Tony leur signala une propriété à louer à Atchison, au Kansas. La maison, qui était la plus ancienne du quartier, avait besoin d’un bon coup de peinture mais elle dégageait une impression de calme et elle répondait à leurs critères.
Le 31 décembre 1992, Tony, Debra, Sasha et les trois chats emménagèrent dans la maison. Peu après leur arrivée, une multitude de petits incidents étranges se produisirent, mais sur le moment ils n’y prêtèrent guère attention. Peu de temps après leur arrivée, Sasha se mit à aboyer et à montrer des dents en direction de la chambre d’enfant. Tony tenta de la calmer, l’incitant à le suivre, mais elle refusa de bouger pendant plusieurs minutes, continuant à grogner. La chienne se comporta ainsi à plusieurs reprises, toujours au même endroit, puis brusquement, au bout d’une semaine, elle ne montra plus aucun signe d’hostilité.
Quelques semaines plus tard, alors que Debra et Tony regardaient la télévision blottis l’un contre l’autre, la lumière du plafonnier s’affaiblit lentement jusqu’à devenir une lueur vacillante puis brusquement, quelques minutes plus tard, elle retrouva son intensité habituelle. Au cours des jours suivants, comme le même phénomène se répétait, Tony vérifia l’interrupteur, puis il changea les ampoules et les fusibles, fit venir un électricien, mais ce fut en vain. Un soir, alors que l’intensité des ampoules faiblissait une fois encore, il dit en plaisantant: » C’est un fantôme. » A ce moment là, la lumière sembla se figer et un rire nerveux lui échappa. Durant son enfance, Tony avait été témoin d’un phénomène inexplicable et depuis il était terrifié par tout ce qui touchait au surnaturel. Parfois, quand elle se retrouvait seule, Debra sentait glisser sur elle un souffle d’air glacé et des interférences se manifestaient en différents endroits de la maison, brouillant les conversations et faisant retentir la minuterie de la cuisinière d’occasion qu’ils venaient d’acheter.
Vers le milieu du mois de mai, la chaleur et l’humidité étaient tellement insupportables que Tony et Debra dormaient souvent sur le divan du salon, portes et fenêtres ouvertes.
Une nuit, Debra fut brusquement réveillée par des cris à glacer le sang puis de bruits de pas lourds résonnèrent dans l’escalier. La jeune femme pensa qu’un intrus s’était introduit dans la maison mais avant même de s’être redressée quelque chose de lourd la heurta de plein fouet. Terrifiée, elle se mit à crier et son hurlement réveilla son mari qui se mit à crier lui-aussi. Ils crièrent de concert durant plusieurs minutes puis Tony réalisa qu’il ne savait pas pourquoi il agissait ainsi et il s’arrêta brusquement. Il tenta alors de calmer sa femme qui, paniquée, resta un long moment immobile, les yeux écarquillés. Dix minutes plus tard, elle riait de leur comportement. Dans l’obscurité, les chats erraient furtivement, le poil hérissé, comme s’ils appréhendaient quelque chose. Soudain, ils se regardèrent en sifflant, puis détalèrent et allèrent se cacher.
Lorsque Debra et Tony ramenèrent Taylor de l’hôpital, le bébé se réveillait souvent la nuit. Leurs proches leur donnèrent mille conseils, ils dévorèrent des livres et des articles de magazines mais tous en arrivaient à la même conclusion: soyez patients! Comme la situation ne semblait guère s’améliorer, Karen, la sœur de Debra, proposa de venir les aider. Le jour de son arrivée, alors que Tony et son jeune frère George montaient une commode dans la chambre d’enfant, le mobile suspendu au-dessus du lit de Taylor se mit à tourner tout seul , faisant entendre sa musique. Perturbés, les deux hommes en parlèrent à Debra, mais la jeune femme crut qu’ils se moquaient d’elle et elle les ignora.
Une semaine plus tard, le 25 juillet, le couple passa l’essentiel de leur journée dans la famille de Tony, rentrant chez eux en soirée, mais quand ils voulurent ranger les affaires de Taylor dans sa chambre, ils s’aperçurent que tous ses animaux en peluche avaient été disposés dos à dos sur le plancher, formant une ronde au milieu de la pièce. Karen formula alors l’hypothèse à laquelle Debra et Tony refusaient d’envisager depuis quelques semaines: » Vous croyez qu’il y a un fantôme? » Immobiles au seuil de la porte, ils observèrent en silence les peluches posées sur le sol, mais ils ne s’enfuirent pas. S’il s’agissait d’une plaisanterie, ils n’avaient aucune envie d’être vus courant hors de la maison comme des lapins effrayés.
Tony, qui avait besoin d’un avis objectif, téléphona alors à son frère Larry et lui décrivit les curieux phénomènes qu’ils avaient observés depuis leur emménagement dans leur nouvelle maison. Larry, qui habitait à quelques minutes de chez eux, arriva peu après 23h30. Même s’il n’était pas prêt à admettre qu’il puisse y avoir un fantôme, après avoir été témoin du déplacement inexplicable d’une peluche, Larry reconnut qu’il se passait des choses bizarres dans la maison et il proposa d’en parler à Barbara, une médium de ses connaissances.
Le lendemain matin, Tony partit travailler, Debra amena sa sœur à l’aéroport puis elle rentra seule chez elle. Toute sa vie elle avait espéré voir un fantôme, mais maintenant, elle se sentait nerveuse.
Après sa journée de travail, Tony s’arrêta chez sa mère, qui voulait lui parler. La vieille dame, qui s’était renseignée sur la maison, lui expliqua que la locataire précédente avait été victime de nombreuses manifestations paranormales et que sa fille s’était entichée d’une compagne de jeu imaginaire qu’elle appelait Sallie. Elle passait des heures à s’amuser avec elle mais bizarrement, plus personne n’en avait entendu parler après leur déménagement.
De son côté, le frère de Tony avait réussi à rentrer en contact avec Barbara, la médium, qui pensait que la maison abritait l’esprit d’une fillette de cinq à onze ans, qui se prénommait probablement Sallie car ce prénom lui revenait sans cesse. Elle conseillait aux Pickman de dire à l’esprit qu’ils étaient prêt à l’accueillir mais ils devaient bien insister pour lui faire comprendre que cette maison était la leur, et que si elle souhaitait y rester, elle devrait se plier à leurs règles.
Vers 17h, lorsque George, le jeune frère de Tony, s’arrêta chez eux, Tony lui raconta toute l’histoire et George lui demanda s’il se moquait de lui. Las de devoir se justifier, Tony prit alors de l’appareil photo que sa femme avait laissé sur la table de la salle à manger et le dirigeant vers la peluche qui se trouvait près de la télévision, il s’écria: » Sallie, si tu es là, souris! «
George, qui regardait l’ourson, s’écria alors: » Il a bougé! Le fichu truc a bougé! » A ce moment-là un grand froid lui traversa le corps, puis une force invisible le tira en arrière, l’empêchant de bouger pendant quelques secondes. Cet incident le choqua tellement que Tony décida de l’éloigner de la maison pour lui permettre de reprendre ses esprits. Pendant que George faisant les cent pas devant dehors, Tony et Debra attrapèrent le bébé et rassemblèrent quelques effets indispensables. Tony était assis à gauche du siège-auto, il tentait de donner sa tétine à Taylor, quand brusquement il grimaça de douleur et bondit sur ses pieds. Lorsque Debra souleva sa chemise, elle découvrit trois griffures sanguinolentes entre ses reins. Tony commençait à se demander si l’esprit était bien celui d’une petite fille mais quand il tenta d’en parler à sa femme, celle-ci s’offensa qu’il puisse même en douter.
Ne sachant comment réagir, Debra téléphona à Barbara qui lui conseilla d’avoir une conversation avec Sallie et de la gronder comme elle le ferait avec n’importe quel enfant. Inspirant profondément, la jeune femme dit d’une voix qui se voulait ferme: » Sallie, nous sommes très fâchés et nous devons te parler. » Quelques instants plus tard, Tony et Debra se regardèrent et haussèrent les épaules. Comment savoir si elle était là? Néanmoins, elle poursuivit sans flancher le discours qu’elle avait plus ou moins planifié.
Devant eux, les trois chats, silencieux, bougeaient leurs têtes de concert, semblant suivre du regard quelque chose qui flottait dans les airs. Au plafond, les cordons du ventilateur se balançaient, alors qu’il n’y avait pas le moins souffle de vent. Comme Debra arrivait à la fin de son monologue, le téléphone se mit à sonner. Après réflexion, Barbara souhaitait venir sur place pour s’assurer de l’exactitude de ses interprétations et un rendez-vous fut fixé pour le lendemain. Quelques instants plus tard, prise d’une inspiration subite, Debra proposa à Sallie de lui laisser des crayons de couleur et du papier afin de leur permettre de communiquer. De par son expression, Tony semblait penser qu’elle était folle. Sur la photo qu’il avait prise quand l’ourson avait bougé, apparaissait une forme floue qui allait se montrer à de nombreuses reprises. Une forme qu’il trouvait des plus inquiétantes, mais qui semblait émerveiller sa femme.
Le lendemain matin, Debra entreprit des recherches sur la maison. Au cours des semaines qui suivirent elle éplucha de nombreux documents officiels mais malheureusement, aucune enfant nommée Sallie ne semblait avoir vécu dans la maison, et encore moins y être décédée.
Lors de sa visite, Barbara parvint à établir le contact avec l’esprit qui lui répondit, empruntant la voix et le langage d’un jeune enfant. La petite fille, qui disait avoir sept ans, considérait Taylor comme son petit frère, elle le protégeait et lui vouait apparemment une adoration sans borne. Elle semblait apprécier Debra, qu’elle suivait en permanence, mais elle faisait preuve d’une incroyable méfiance envers les hommes. Comme la fillette ne possédait rien, ils décidèrent de lui offrir divers objets, dont une poupée, qui n’appartiendraient qu’à elle. Ces objets seraient disposés dans la chambre d’enfant et elle devrait les ranger après s’en être servi. Quand aux crayons qui avaient été laissés à son intention, elle n’était pas encore parvenue à les utiliser.
Debra, qui était touchée par la tristesse et la solitude de cette enfant, décida alors de lui faire une place dans sa vie. Selon Barbara, la petite fille restait dans la maison par choix, mais elle pouvait aller et venir à sa guise si elle le souhaitait. Rien n’était figé. Il était également possible qu’elle grandisse avec Taylor, qu’elle le guide au fil des ans, qu’elle intervienne en sa faveur ou qu’elle lui révèle son avenir. En entendant ces mots, Debra ne sut pas si elle devait s’en réjouir ou s’en effrayer.
Après le départ de Barbara, Tony téléphona à ses parents pour les inviter à visionner la vidéo que George avait tournée durant la soirée, proposant également à leurs voisins, qui leur avaient gracieusement prêté une caméra, de venir voir le résultat du tournage. Don et Carol, les voisins, arrivèrent peu après les parents de Tony. Carol avait apporté avec elle deux vieilles poupées plutôt sales qu’elle avait récupérées après que George leur ait raconté la soirée et immédiatement Tony et George les portèrent à la chambre d’enfant. Ils redescendirent aussitôt, les poupées toujours en main. Les oursons avaient été déplacés et sur le bloc-notes que Debra avait laissé à l’intention de l’esprit, se trouvait maintenant un message. Très excitée, la jeune femme courut au premier et tout le monde la suivit. A côté de la question: Coucou Sallie, quel âge as-tu?, une main enfantine avait tracé ces mots: 7 ENVIRON.
Le lendemain, Debra nettoya et habilla la plus grande des poupées puis, une fois l’opération terminée, elle la souleva pour la présenter à Sallie. Elle prit ensuite plusieurs photos de la chambre, espérant y voir un signe, mais le lundi matin, quand elle ouvrit l’enveloppe contenant ses clichés, ce qu’elle découvrit lui coupa le souffle. La première photo montrait les poupées assises dans un coin de la chambre et juste devant elles, se trouvait un tourbillon bleu, sombre et menaçant, qui obscurcissait presque toute l’image. Horrifiée, Debra ne pouvait pas quitter l’apparition des yeux. Rassemblant son courage, Debra regarda la photo suivante, qui était tout aussi inquiétante.
Quelques jours plus tard, cherchant toujours à photographier l’enfant, Debra prit plusieurs clichés, en vain. Par contre, sur certaines des photos, un spectre se tenait en haut de l’escalier, flottant sous le plafond. Vêtu d’un costume ou d’un uniforme foncé, sa chemise était blanche, il portait un chapeau et il semblait tenir une épée ou une baïonnette.
Peu après, George et Debra, qui pensaient que Sallie n’avait pas aimé ses vieilles poupées, lui en achetèrent une neuve et la jeune femme rassembla un certain nombre d’objets dans un coin, afin de créer un espace réservé à la fillette. Dans une grande boîte bordeaux achetée pour l’occasion, elle déposa une poupée qui lui était chère, une vieille robe de soirée, une chapeau, des perles, des barrettes à cheveux, un biberon, un hochet et divers objets.
Lorsque Tony rentra du travail et vit la poupée que sa femme avait achetée, il devint cynique: il fallait être un peu cinglé pour acheter des présents à un fantôme. Ignorant ses remarques, Debra emballa la poupée, toujours dans sa boite, puis elle écrivit sur une carte: » À Sallie. Nous t’aimons et espérons que ta nouvelle poupée te plaira. Avec tout notre amour, oncle George, papa, maman et Taylor. «
En rentra dans la chambre, elle remarqua immédiatement que les vieilles poupées qu’elle avait laissées assises l’une à coté de l’autre avaient changé de position: la petite poupée reposait maintenant sur les genoux de la plus grande et Debra les trouva adorables. Quelques jours plus tard, au début du mois d’août, elle découvrit que la poupée de Sallie reposait maintenant au milieu du lit de Taylor. Les rubans adhésifs et le papier d’emballage étaient intacts mais la boite était vide.
Debra et Sallie devenaient de plus en plus proches. Souvent, quand son mari n’était pas là, la jeune femme lui parlait tout haut, l’invitant à se blottir contre elle ou lui proposant de lui raconter une histoire. A une occasion, la petite fille avait même décidé du livre, parasitant la télévision pour exprimer son choix. Debra avait tellement confiance en elle que parfois, quand elle devait s’absenter quelques minutes, elle lui confiait Taylor, sachant qu’elle veillerait sur lui.
La fillette réclamait souvent de l’attention, surtout quand tout le monde était occupé, et elle semblait prête à tout, en bien ou en mal, pour l’obtenir. Tony se méfiait terriblement de Sallie et si parfois il remarquait sa présence, la plupart du temps il n’ignorait. La fillette s’efforçait de l’intéresser, lui mordillant les orteils quand il se trouvait dans son lit, devant la télévision ou à table, et à une occasion, voyant qu’il ne réagissait pas, elle l’avait mordu si violemment qu’il en avait hurlé de douleur et de rage. Cet incident lui avait laissé de belles traces de dents sur sa jambe et un énorme hématome qui avait mis plusieurs jours à s’estomper. Tony était terrifié. A ses yeux, ce qui hantait cette maison n’était pas une petite fille, mais un être malfaisant se faisant passer pour un enfant. Il avait tenté d’en parler à Debra à plusieurs reprises, mais chaque discussion dérivait en dispute et, de toutes façons, ils n’avaient plus assez d’argent pour se permettre de déménager.
Le 31 octobre 1993, jour d’Halloween, Tony revint à la maison vers 7h du matin puis il se dirigea vers la cuisine, se versa un jus d’orange, mais au moment où il allait en avaler une gorgée, son cœur se figea dans sa poitrine.
Debout au milieu de la pièce se tenait une fillette d’environ 1m15 dont les immenses yeux bleus exprimaient une grande surprise. Elle avait une allure étrange avec sa robe démodée en dentelle blanche et ses manches bouffantes. Ses boucles brunes, que retenait une grosse barrette fantaisie agrémentée d’un ruban, encadrait des joues rondes comme celles d’un chérubin. Elle se tenait là, curieuse et immobile, le regardant les yeux écarquillés et Tony pensa qu’elle semblait aussi réelle que lui. Perdant brusquement le contrôle de ses muscles, le verre glissa de sa main et s’écrasa sur le sol. Machinalement, il jeta un coup d’œil sur le verre brisé et le jus de fruit qui s’était répandu sur le plancher mais lorsqu’il releva les yeux, la fillette avait disparu.
Une vague de terreur le traversa et il resta cloué sur place. Son esprit sceptique refusait d’admettre ce qu’il avait vu, et pourtant, il devait se rendre à l’évidence. Lorsqu’il retrouva l’usage de son corps, Tony s’élança hors de la pièce, grimpa l’escalier au pas de course et pénétra dans la chambre où sa femme dormait encore. Hors d’haleine, les yeux écarquillés il s’écria: » Je l’ai vue. Bon sang, Debra, je l’ai vue! «
Tony commença à lui décrire l’apparition, puis il s’empressa de la dessiner avant de l’oublier. Sur son croquis, la fillette semblait avoir cinq ans, peut-être moins, et ils se demandèrent si Sallie n’avait pas menti sur son âge, comme le font souvent les jeunes enfants. C’était peut-être ses traits délicats qui donnaient cette impression car elle avait un visage de poupée. Elle avait l’air soignée et fortunée. Ses cheveux sombres remontés sur le dessus de sa tête étaient retenus par une grosse boucle souple. Ces grands yeux bleus, inexpressifs, semblaient froids. En regardant son visage, il était difficile de croire que cet enfant à l’air doux avait griffé Tony si violemment. Debra accrocha son portrait au mur, près des membres de la famille, espérant que ce geste lui ferait plaisir. Tony, de son côté, essayait de chasser les voix qui envahissaient son esprit, trop épuisé pour en décrypter les mots.
Cette année-là, désirant réunir sa famille, Debra avait décidé de célébrer l’Action de Grâce une semaine plus tôt. Quelques jours avant leur arrivée, Debra informa Sallie de leur visite, afin que la fillette n’en soit pas bouleversée ou effrayée. Le jour venu, Sallie se manifesta de manière significative, faisant tinter des objets dans la cuisine, tourner des horloges à l’envers, grattant aux fenêtres etc… La petite fille, qui était probablement très excitée à l’idée d’avoir des visiteurs, les saluait à sa manière.
Un après-midi, vers 15h30, Debra préparait le diner quand Karen surgit à la porte de la cuisine, les yeux écarquillés. Elle tenait entre ses mains un ours en peluche, celui qui se trouvait habituellement près de la télévision et que Sallie si souvent retourné contre le mur. » Il était en flammes! » s’écria-t-elle en entrant dans la pièce. Elle lui raconta qu’elle somnolait sur le canapé du salon quand soudain, se réveillant pour une raison obscure, elle avait vu des flammes de 15 à 20 centimètres jaillir de la tête de l’ourson. Elle l’avait immédiatement ramassé mais en arrivant à la cuisine, les flammes s’étaient éteintes.
Prenant l’ours dans ses mains, Debra le montra à sa mère, qui la regarda d’un air suspicieux. Malgré les différentes manifestations de Sallie, elle ne croyait toujours pas en fantôme et, pire encore, elle s’imaginait que ses deux filles se jouaient d’elle. Debra, qui était terrifiée à l’idée que des flammes de cette importance mettent le feu à la maison, entreprit de réprimander fermement le fantôme devant sa mère sidérée.
Le 15 novembre, Debra reconduisit sa famille jusqu’à l’aéroport sans qu’aucun nouvel incident n’ait été signalé. Le même jour, alors qu’elle travaillait, Tony reçut Ray, l’un de ses collègues de travail. Alors qu’ils se trouvaient au salon, les billes de bois du ventilateur du plafond se mit à se balancer vers Ray qui, prévenu de l’histoire, fit brusquement semblant de dormir. Brusquement, alors qu’il fermait les yeux, un vase vola au-dessus de sa tête et alla s’écraser sur le sol. Sallie n’aimait pas être ignorée.
Quelques jours plus tard, Ray téléphona à Tony et lui demanda s’il pensait que le fantôme pouvait le suivre chez lui car depuis quelques jours, il se passait des choses étranges. Des vêtements se déplaçaient dans sa chambre, des cartons volaient dans l’air mais le plus bizarre était probablement la grande flaque d’eau sur plancher de sa salle à manger pour laquelle il n’avait trouvé aucune explication.
Une longue période de tranquillité suivit l’épisode du vase. Pour fêter Noël, une grande réception avait été prévue le 18 décembre mais comme les jours passaient sans aucun signe de Sallie, une certaine nervosité avait gagné Debra. Ce jour-là, de nombreux étrangers devaient être présents et elle se voyait mal leur expliquer leur cohabitation avec un fantôme.
Le jour venu, à 20h, un membre de la famille déguisé en Père Noël distribua des cadeaux aux enfants, les laissant grimper sur ses genoux à tour de rôle, mais Debra ressentit un étrange chagrin en pensant à Taylor, qui s’était endormi avant la distribution, et à Sallie, qui devait se sentir rejetée. La jeune femme n’avait prévu aucun cadeau à son intention, et le sentiment de tristesse qui flottait dans la maison était accablant. Comme il se faisait tard, les invités commencèrent à partir et Tony monta dans la chambre à coucher chercher les derniers manteaux. Il était presque au premier quand soudain, l’avertisseur de fumée se déclencha brusquement. Au bas de l’escalier, sur la cinquième marche, une poupée venait de s’enflammer. Tony attrapa précipitamment la poupée et courut à l’étage, fuyant les questions embarrassantes des invités. Lorsqu’il atteignit l’évier de la salle de bain, il constata que ses deux avant-bras étaient brûlés et, ne souhaitant inquiéter personne, il décida d’attendre avant d’en parler.
Louise, la tante de Debra, fut l’une des dernières personnes à partir et, au moment des au revoir, elle fit cette remarque étonnante: » Sallie a dû se sentir rejetée, parce qu’elle n’a rien reçu du père Noël. «
La vieille dame proposa alors de refaire passer le père Noël, afin que Taylor puisse le voir et que Sallie reçoive un cadeau. L’offre était généreuse, et Debra la remercia pour son geste. Le dernier invité parti, la jeune femme expliqua à Sallie qu’elle s’était très mal conduite puis, terriblement attristée par le fait qu’elle ait été exclue, elle lui dit, sur un ton plus indulgent: » Le père Noël n’était pas au courant de ta présence, ma chérie, c’est pourquoi il ne t’a rien apporté. «
Comme ils ne parvenaient pas à empêcher Sallie de mettre le feu dès qu’elle se sentait contrariée, Debra lui montra du doigt une lampe à huile qu’elle avait allumée quelques instants plus tôt et elle lui dit : » J’ai une idée dont j’aimerais te parler. Je pense que tu vas l’aimer. Tu vois cette flamme? Je sais bien que nous t’avons interdit d’allumer des feux, mais je te dis maintenant que tu peux allumer cette flamme, là-dedans, et que cela ne t’attirera pas d’ennuis. «
Deux jours après la réception, le dimanche 20 décembre,en fin d’après-midi, le Père Noël vint leur rendre visite. Tony prit quelques photos de Taylor sur les genoux du vieil homme, et ce dernier invita Sallie à les rejoindre. Un instant plus tard, Louise écarquilla les yeux, terrifiée, et s’écria: » De la fumée! Il y a de la fumée! Mon Dieu, Debbie! Il y a de la fumée noire derrière toi! » La peur éteignit le cœur de Debra mais lorsqu’elle se retourna, elle vit une épaisse fumée noire sortir en tourbillonnant de la lampe à huile de Sallie et un grand sourire éclaira son visage. La fillette soulignait sa présence au moyen de la lampe, comme elle le lui avait demandé.
Comme Tony et Debra étaient attendus chez les parents de Tony pour le 25 décembre à 9 heures, ils avaient décidé d’ouvrir leurs cadeaux la veille de Noël. A 20h, la salle à manger était jonchée de papiers d’emballage et Taylor rayonnait de joie. Tony, voulant faire plaisir à sa femme, lui suggéra alors d’aider Sallie à déballer ses cadeaux. Debra avait acheté à son intention un petit animal en peluche, un livre de coloriage, un petit sac à main blanc et un berceau en bois pour la poupée qu’elle lui avait donnée quelques mois auparavant. Après avoir déballé ses cadeaux, Debra, qui se sentait toujours un peu ridicule à parler dans le vide, proposa à la fillette de se faire photographier près du berceau mais elle ne manifesta aucun signe de présence.
Le 26, impatiente, Debra courut faire développer les photos dès l’ouverture du magasin et elle les regarda immédiatement, alors qu’elle se trouvait dans la file d’attente. Non seulement Sallie se trouvait près d’eux la veille de Noël, mais il y avait aussi une autre entité. Sur trois photos, on voyait près de Debra deux présences distinctes. L’une d’elle était grisâtre et l’autre lumineuse, semblable à un nuage. Troublée, Debra décida d’écrire à Barbara pour lui demander son avis.
Le 5 janvier Tony fut soudain réveillé par d’étranges bruits sourds semblables à des pas dans l’escalier puis dans le couloir. Cela faisait déjà plusieurs nuits qu’il entendait ces bruits, mais il avait supposé qu’ils s’agissait des chats qui jouaient à l’extérieur de la chambre. Vers 1h, contrarié de ne pas pouvoir se rendormir, il en eut assez. Il se leva et alla attendre en haut de l’escalier. Il se tenait là, devant les marches, quand soudain il entendit ce bruit sourd qui lui était maintenant familier. Comme le bruit se rapprochait et qu’il ne voyait rien, la peur le cloua sur place et son cœur s’emballa dans sa poitrine. Son corps semblait paralysé, à l’exception de ses yeux qui ne cessaient de fouiller l’obscurité. Le bruit le dépassa et il sentit très distinctement une vague glacée le traverser de part en part. Il demeura figé un instant mais comme rien ne se produisait il courut réveiller Debra pour lui raconter son histoire. La jeune femme, épuisée, marmonna quelques mots incompréhensibles et se rendormit aussitôt. Au petit matin, Tony revint sur les événements de la nuit et sur le rêve étrange qu’il avait fait par la suite, ce qui était curieux, car habituellement, il ne s’en rappelait jamais. Dans celui-ci, quelqu’un qu’il n’arrivait pas à voir le saisissait par les poignets et tentait de le tirer du lit. Tony avait fermement ordonné à son agresseur de le lâcher, et celui-ci lui avait obéi sur le champ.
Un peu plus tard, intrigué par une douleur persistante aux poignets, Tony découvrit des cloques rouges à l’intérieur de ses bras. Exactement à l’endroit où il avait senti quelqu’un l’attraper. Ces traces ressemblaient à des brûlures au second degré mais en les examinant de plus près, Debra comprit qu’il s’agissait de marques de doigts. Elles rappelaient la forme des mains et des doigts d’un enfant.
Tony, qui était visiblement la cible de l’esprit de la maison, vivait de plus en plus mal cette situation. Il s’inquiétait pour sa sécurité et pour celle de sa famille mais il se sentait faible de ressentir une telle peur. Il craignait que l’esprit ne finisse par s’en prendre à quelqu’un d’autre, peut-être même à Taylor, si jamais il se lassait de lui.
Quand il songeait à ce qu’ils subissaient, il trouvait que leur situation ressemblait à celle d’Amityville et cette idée le terrifiait. Lentement, il sentait le mal s’enrouler autour de ses pensées et, chaque jour, il priait Dieu de ne pas sombrer. Il lui était très difficile de comprendre ce qui lui arrivait et ce qui ce passait autour de lui. Tony ne pouvait pas en discuter avec sa femme, dont le point de vue était nettement biaisé. Il avait tenté de lui expliquer que la maison abritait quelque chose de malfaisant, mais Debra vivait cette histoire comme un conte de fée. Elle n’avait pas peur, elle ne se méfiait pas et Tony ne comprenait pas pourquoi. Jamais il ne s’était senti aussi seul.
Au cours de l’après-midi du 9 février 1994, Tony et Debra regardaient la télévision mais quand ils voulurent se servir de la télécommande, ils s’aperçurent qu’elle ne se trouvait plus à sa place habituelle. Comme personne n’avait quitté la pièce, ils la cherchèrent entre les petits coussins du divan, sur le plancher et sur les tables sans la trouver. À 22 h 30, Tony s’endormit sur le divan et Debra en profita pour aller prendre un bain à l’étage. Trente minutes plus tard, quand elle retourna au salon, Tony dormait toujours dans la même position mais la télécommande de la télé se trouvait maintenant sur le haut de ses cuisses.
Quand il se réveilla, Debra lui demanda où il avait retrouvé la commande et, pensant qu’elle plaisantait, il lui retourna la question, ajoutant qu’elle l’avait touché à l’épaule et qu’elle lui avait dit: » Tony, la voici ta télécommande. » Tony devint livide et Debra comprit soudain qu’il parlait sérieusement. Apparemment, le fantôme d’une femme s’était invité dans la maison, ce qui ne semblait pas spécialement troubler Debra.
Deux jours plus tard, le couple se préparait à sortir diner dehors. Debra démêlait ses cheveux humides devant la coiffeuse de la chambre quand soudain la voix de Tony la fit sursauter: » Est-ce que tu viens de passer devant la salle… » Puis, constatant que sa femme n’était pas encore habillée, il interrompit sa phrase et lui expliqua qu’il venait de voir passer une femme aux cheveux blonds relevés se diriger vers une chambre. Elle lui ressemblait tellement qu’il aurait pu jurer que c’était elle. Apparemment, l’intruse essayait de capter l’attention de Tony et Debra sentit une fois encore la jalousie l’envahir. Elle qui avait toujours voulu des fantômes n’en voyait aucun mais son mari, qui en avait une peur terrible, en était à deux. Tony, désespéré, se demandait s’il n’était pas en train de devenir fou. Il était le seul à entendre des voix et à voir des fantômes.
Peu de temps après, George demanda à Debra l’autorisation d’amener deux collègues de travail pour une petite expérience. Le soir venu, il arriva à 22h45, en compagnie Chris et John, deux collègues de travail, pour une séance de spiritisme improvisée. Au moment où ils passaient la porte, la lampe à huile de Sallie s’alluma brusquement et Debra se demanda si la fillette souhaitait, par ce moyen, leur faire comprendre qu’elle approuvait ce projet.
Tout le monde prit place autour de la table de la salle à manger et immédiatement, ils sentirent des courants d’air froids balayer leurs visages. Ils n’étaient pas seuls. Ils décidèrent alors d’éteindre la lumière et d’allumer les cierges que Sallie affectionnaient tant, sans vraiment savoir pourquoi. Ils agissaient au feeling, sans vraiment réfléchir. George demanda alors à l’esprit de se manifester, mais seul le silence lui répondit. Alors ils recommencèrent à discuter, les mains posées en évidence sur la table. Ainsi, si un phénomène étrange se produisait, personne ne serait suspecté.
Vers 23h, Tony agita les mains devant son visage, affirmant qu’il sentait quelque chose tourner autour de lui. 20 minutes plus tard, Chris, fixant Tony, lui demanda ce qu’il avait sur le front et se penchant sur sa chaise il s’écria brusquement: » C’est du sang! «
Tony se tourna vers Debra, la questionnant du regard, et la jeune femme vit clairement sur son front une longue trainée de sang. L’examinant dans la pénombre, elle constata que ce sang provenait de petites griffures situées au-dessus des sourcils. Elles ressemblaient à des griffures de chat. A la base des cheveux, une grosse entaille aurait du entrainer une douleur vive, mais Tony déclara qu’il ne sentait rien.
George et Debra demandèrent à Sallie d’allumer la lampe si elle était responsable de cet acte, mais rien ne se produisit. Vers la de la soirée, la jeune femme proposa à la fillette de se manifester si elle était présente, et soudain, un doux parfum s’éleva dans les airs. Peu après, Chris et John déclarèrent qu’ils étaient fatigués et qu’ils allaient rentrer chez eux. Ils se levèrent, tout comme Debra, qui remarqua soudain que George et Tony avaient la tête sous la table. Leur demandant ce qu’ils cherchaient, les deux hommes répondirent qu’ils avaient vu passer un éclair brillant qui avait foncé sous la table. Debra alluma la lumière et là ils découvrirent l’une des tétines de Taylor. Le bout avait méchamment fondu, il était terriblement boursoufflé et il s’en dégageait une affreuse odeur de plastique brûlé. Lorsqu’ils la ramassèrent, elle était encore chaude. L’esprit était apparemment disposé à communiquer avec eux, mais encore devaient-ils trouver un moyen de le faire.
Un après-midi, Tony, qui avait de plus en plus de mal à dormir quand il était seul dans la maison, s’endormit sur le canapé du salon mais quelques minutes plus tard il se redressa brusquement et braquant son regard sur Debra il déclara d’une voix étrange: » Il m’appartient! » Troublée par son comportement, elle le regarda avec stupéfaction. La voix ressemblait à la sienne, mais elle était froide et impersonnelle. Il resta immobile pendant plusieurs minutes, sans dire un mot, puis brusquement il ferma les yeux et s’endormit. Debra s’interrogea quelques instants puis, pensant qu’il devait rêver, elle oublia l’incident.
Quelques semaines plus tard, la jeune femme se rendit à la bibliothèque pour se renseigner sur les fantômes et elle ramena une douzaine de livres chez elle. Vers 22h30, quand Tony partit travailler, il en prit quelques uns avec lui et Debra continua à lire jusqu’aux petites heures du matin. A 4h, Tony et l’un de ses collègues s’étaient assis pour discuter des phénomènes surnaturels quand soudain, un vent inhabituellement fort ouvrit violemment la lourde porte du bureau. Il traversa la pièce avec une telle violence que la fenêtre vola en éclats, s’écrasant sur le sol avec son cadre. Par la suite, la rumeur se répandit parmi les ouvriers que Tony était entouré de manifestations paranormales, et plus personne ne voulut travailler près de lui.
Depuis quelques temps, Sallie restait près d’eux tout au long de la journée, se manifestant souvent à travers les jouets musicaux de Taylor. Le 11 mars au soir, Debra confectionnait un habit vert pour Taylor qui devait participer au défilé de la Saint-Patrick approchait quand soudain son mari, qui s’était endormi au salon, fit irruption dans la salle, bouleversé. Le souffle court, il lui raconta qu’il dormait sur le divan quand il avait senti un fort coup de vent, qui lui avait ébouriffé les cheveux. Il avait alors tenté de se redresser, mais il n’arrivait pas à bouger. Il ne pouvait remuer aucune partie de son corps. Finalement, il avait demander à Sallie de le laisser se lever, et presque immédiatement, il avait senti un poids de soulever de son corps. Comme toujours, Debra voyait dans les manifestations de Sallie d’amusantes facéties et rien ne semblait l’inquiéter.
Le 22 mars, Tony et Debra recevaient des invités. Alors qu’elle s’affairait au salon, trois d’entre eux échappèrent à sa vigilance et montèrent au premier. Quand Debra les entendit se moquer de Sallie elle réagit immédiatement mais apparemment, il était déjà trop tard. La fillette, apparemment furieuse que Tony les ait laissés monter, le griffa du front au menton et fit faillir une flamme de 60 centimètres tout près de lui. Debra la sermonna, l’envoya dans sa chambre, et peu après, des bruits de pas résonnèrent dans la pièce.
A la fin du mois de mars 1994, Debra organisa un voyage dans sa ville natale, à Buffalo, dans l’état de New York. Ce voyage, qui devait avoir lieu pendant les vacances de Pâques, était prévu depuis plusieurs semaines et elle en avait informé Sallie afin d’éviter toutes représailles de sa part. Elle l’avait également prévenue que Lisa, une voisine, viendrait s’occuper des animaux et les nourrir en leur absence.
Quelques jours plus tard, en arrivant à Buffalo, Tony et Debra s’aperçurent que Sallie les avait suivis. Durant leur séjour, la fillette manifesta sa présence à sa manière habituelle, fermant les portes, allumant les lumières etc, ce qui fut particulièrement délicat à expliquer.
Un soir, Tony expliqua à Debra que souvent il sentait une pression sur le haut de ses cuisses et que des mains glacées remontaient le long de ses jambes. Quelques jours plus tard, il la tira d’un sommeil profond, la secouant violemment pour lui dire que le phénomène était en train de se produire et qu’il ne pouvait plus bouger ses jambes. Comprenant que quelque chose se trouvait sur lui, Debra se redressa et ordonna à cette force de se retirer. Au bout d’une minute, la pression disparut mais sur les jambes de Tony et à l’intérieur de ses cuisses, se trouvaient maintenant de curieuses marques rouges qui ressemblaient à des empreintes de main. Après cette expérience, Debra comprit que son mari endurait bien plus de choses qu’elle ne le pensait.
Le 25 juin, alors qu’elle discutait avec Tony assise sur le bord du lit, Debra aperçut une boule lumineuse resplendissante qui scintillait sans discontinuer. L’apparition, qui se trouvait en haut des escaliers, s’immobilisa dans les airs pendant une fraction de seconde puis elle dessina une spirale, fila en bas et disparu, laissant un trait de lumière derrière elle. Quelques jours plus tard, dans la soirée, Taylor leva la tête et se retourna brusquement comme pour suivre du regard un objet au-dessus de lui. Dix minutes plus tard, Tony, qui était allongé sur le dos, aperçut un éclair lumineux dans un coin de la pièce, près du plafond. Selon sa description, il s’agissait d’une boule tourbillonnante de lumière très vive semblable à celle que Debra avait vue dans la cage d’escalier quelques jours auparavant.
S’il ne pouvait le confirmer, Taylor, tout comme les animaux, semblait capable de déceler les manifestations invisibles. Souvent, l’enfant regardait dans le vide ou suivait des yeux quelque chose qui passait au-dessus de sa tête. Il souriait en agitant la main pour saluer quelqu’un que lui seul semblait voir et parfois il se tortillait, riant gaiement.
Au cours du mois de juin, pour une obscure raison, Taylor se mit à hurler en entendant son clown musical. Il semblait tellement effrayé que Debra dut se résoudre à le jeter. Quelques jours plus tard, quand sa mère voulut le poser dans son lit, il se mit à pleurer, s’agrippant à elle avec une force surprenante et refusant de dormir sa chambre. Au début, elle se dit que l’enfant faisant des caprices, mais comme le phénomène se reproduisait nuit après nuit et qu’il semblait vraiment terrifié, elle finit par se demander s’il n’était pas importuné par un esprit. Après avoir réfléchi au problème, elle décida de demander de l’aide à Sallie: » Sallie, crois-tu pouvoir m’aider? J’ai besoin que tu surveilles et protèges Taylor. Il est très fatigué et a besoin de sommeil. Peux-tu faire en sorte que personne ne vienne le réveiller et l’effrayer cette nuit? Tu nous rendrais un fier service, à nous et aussi à Taylor. » Cette nuit-là, Taylor ne se réveilla pas une seule fois.
Le 9 juillet, Debra entendit un gémissement étrange en provenance de la chambre où dormait Tony. Croyant qu’il s’agissait de la radio que son mari laissait souvent en marche pour couvrir les bruits de la journée la jeune femme n’en tint pas compte mais un instant plus tard, il l’appela d’une voix déformée. Lorsqu’elle poussa la porte de la chambre, elle l’aperçut allongé sur le lit, les traits étaient déformés par la peur. Haletant, il lui raconta qu’il s’était soudainement réveillé et qu’il avait vu comme des grains de poussières dans la lumières de la fenêtre. Puis le matelas à eau s’était mis à onduler doucement, mais en quelques secondes ces vagues étaient devenues si violentes qu’elles projetaient sa tête à plusieurs centimètres dans les airs. Au pied du lit, les grains de poussière s’étaient rassemblées en une silhouette sombre qui avait brusquement pris la forme du haut d’un corps de femme, les mains repliés devant elle, sur son ventre.
L’apparition s’était alors approchée de lui, et Tony avait pu distinguer d’autres détails, comme ses cheveux sombres et son expression malveillante. Elle s’était approchée encore et il avait vu qu’elle portait des vêtements noirs avec un col orné d’une broche. Le cœur affolé, Tony avait alors tenté d’appeler sa femme mais aucun son n’était sorti de sa bouche. Et puis, en un éclair, elle s’était retrouvée devant lui.
La porte de la chambre s’était refermée dans un claquement sourd, alors que le tiroir de la table de chevet s’ouvraient et se refermait et que l’armoire commençait à pivoter. Soudain, la femme avait avancé sa main en direction de son visage et une voix lui avait dit: » Je vais… » Tony n’avait pas compris la suite. Il se souvenait qu’un long gant de dentelle recouvrait sa main et que son doigt était orné d’un oiseau noir. Il avait réussi péniblement à sortir du lit et il s’était élancé vers la porte mais il n’était pas parvenu à l’ouvrir. Puis soudain, elle avait disparu. Ce jour-là, toute la journée fut parsemée de manifestations et dans la soirée, des gémissements s’élevèrent du couloir.
Plus il réfléchissait aux événements, plus Tony était persuadé que la maison abritait une force démoniaque. Et même si cette force empruntait les traits d’une fillette ou d’une femme ressemblant à Debra, il était certain qu’elle n’était pas inoffensive. Quelques jours plus tard, quand il commença à voir les grains de poussières se rassembler au pied de son lit, il téléphona immédiatement à sa femme et, au bout de trois minutes, la manifestation disparut. Autour de lui, les voix étaient de plus en plus fortes, tout comme la colère qu’il éprouvait envers Debra. Depuis quelques temps, il devait lutter pour ne pas lui faire du mal. Cette pulsion destructrice était tellement forte qu’encore aujourd’hui il ignore comment il parvint à lui résister. Un matin, il lui téléphona au travail pour lui dire qu’il n’arrivait pas à dormir. Après avoir parlé de choses et d’autres, il déclara qu’il se sentait très mal et qu’il était probablement de déménager. Il sentait que quelqu’un allait être grièvement blessé. » Et je pense que ce sera toi, » rajouta-t-il. Il déclara qu’elle était la cible de la colère et de la rage des esprits de la maison. Après avoir raccroché, Debra y songea le reste de la journée, tentant de découvrir le sens de ses propos.
Barbara habitait donnait régulièrement des conférences dans différentes universités non seulement devant des étudiants, mais également des professeurs, des journalistes, des scientifiques, des sceptiques et des journaliste. Dans ces conférences, elle parlait souvent du cas de Tony et Debra mais jusque là elle avait préservé leur anonymat. A la mi-juin, avec leur accord, elle ajouta des photos à son exposé et bientôt le cas suscita beaucoup d’intérêt. Peu après, des représentants de l’émission Unsolved Mysteries et de Sightings la contactèrent, demandant à rentrer en contact avec les Pickman. Le soir même, Barbara leur téléphona, les mettant en garde contre les répercussions d’une telle émission sur leur vie. Elle ajouta, que s’ils acceptaient, ils devraient choisir l’équipe la plus petite afin d’éviter d’être envahis. Debra n’avait jamais songé que leur histoire puisse intéresser les médias, et la proposition était plutôt déconcertante. Elle répondit à Barbara qu’elle en discuterait avec Tony et qu’elle la rappellerait.
La jeune femme pensait que des » connaisseurs » pourraient peut-être répondre aux questions qu’ils se posaient et que leur témoignage pourrait aider des personnes dans leur cas mais Tony redoutait la curiosité et l’éloignement éventuel d’amis ou de membres de sa famille. Au bout d’une semaine, Debra réussit à convaincre son mari d’accepter de parler à l’un des représentants de la plus modeste des équipes mais il souhaitait auparavant que toutes leurs photos soient authentifiées. Quelques jours plus tard, après avoir discuté avec le représentant de Sightings, Debra était plutôt excitée et elle espérait que son mari le serait aussi mais malheureusement, ce ne fut pas le cas. Au bout de plusieurs jours de discussions animées, Tony accepta d’y participer à condition que son identité soit masquée. Alors que le jour du tournage approchait, Tony s’inquiétait de plus en plus, craignant le regard de ses collègues de travail. Le couple se disputait tellement qu’à deux reprises ils cessèrent de s’adresser la parole pendant plusieurs jours.
Le vendredi 6 juillet 1994, après expertise, Williams Edison, le spécialiste des effets visuels de l’émission, leur annonça que les photos étaient authentiques et qu’il n’avait pas pu les reproduire avec les instruments dont il disposait. Cette nouvelle apaisa un peu les tensions, même si Tony continuait à penser que le but de l’émission était de les détruire en les faisant passer pour des imbéciles sur une chaine nationale.
Le week-end suivant, les trois membres de l’équipe de Sightings vint passer deux jours dans la maison des Pickman. Afin de minimiser les répercutions qu’entraineraient forcément leurs témoignages, il avait été décidé que le nom de la ville serait changé et que toutes les images de Tony seraient brouillées. Malgré toutes ces précautions, tout ceux qui virent Tony le reconnurent.
30 minutes après leur arrivée, le tournage commençait, rapidement interrompu par l’irruption des voisins. A ce moment-là, Tony, qui observait la scène en portant Taylor dans ses bras, dit à sa femme que Sallie ne semblait pas apprécier toute cette agitation et lui proposa de venir au salon. Le preneur de son fut le premier à remarquer le problème et la caméra se tourna vers Tony, qui balbutia maladroitement quelques mots. Il expliqua avoir senti un air glacé sur ses bras et juste après, trois égratignures sanguinolentes étaient apparues sur son biceps gauche.
Tony était inquiet pour la suite, mais Debra éprouvait des sentiments contradictoires. D’un côté, elle était heureuse qu’un incident se soit produit en présence de l’équipe, de l’autre, elle ne comprenait pas ce qui avait provoqué cette agression.
Les membres de l’équipe, prudents, décidèrent d’arrêter le tournage et d’attendre la venue du médium. Alors qu’ils se trouvaient au salon, un courant d’air glacé tourbillonnait dans la pièce, faisant entendre de petits crépitement électriques qui ravissaient les personnes présentes.
A son arrivée, Barbara prit contact avec Sallie. La fillette trouvait toute cette expérience follement excitante mais elle avait peur. Après avoir rassuré la fillette, le tournage reprit. Debra fut la première à être interviewée, puis ce fut au tour de son mari. Alors qu’il se tenait en contre-jour devant la fenêtre, Tony semblait distrait et s’interrompait souvent. Soudain, il sentit l’étrange sensation de froid qu’il ne connaissait que trop bien autour de son estomac et il en eut le souffle coupé. » Elle est ici, à mes côtés, déclara-t-il. Je l’ai sentie. Le froid m’a traversé la poitrine. «
Se sentant obligé de prouver ses dires, Tony releva sa chemise et tout le monde fut sidéré. Trois traces de griffes marquaient son ventre au niveau de l’estomac. La caméra fit alors un zoom avant et George s’écria: » Mon Dieu! Regardez, regardez! » Sur le ventre de Tony, une seconde série de griffures venait d’apparaitre. Après cette manifestation, le tournage se déroula sans incident. Une fois l’entrevue de Tony terminée, Barbara, des amis, des voisins et des membres de la famille témoignèrent sur ce qu’ils avaient vu ou entendu et à 23h, après que tout le monde soit parti, Tony et Debra s’écroulèrent sur le canapé, épuisés.
Le lendemain, Sightings avait invité Howard Heim, enquêteur du paranormal, à venir évaluer la maison à l’aide de divers appareils mais il ne découvrit aucun champ électromagnétique pouvant expliquer les manifestations de la veille. Tout au long de la journée, des vents glacés intenses balayèrent la maison, fascinant le chercheur, puis la maison sembla soudain chargée d’électricité. Sur le rebord d’une fenêtre, la rose qu’avait cueillie Tony pour sa femme avait une apparence étrange. Chacun de ses pétales était brûlé sur tout son pourtour jusqu’à la base de la rose elle-même, ce qui semblait impossible.
En fin d’après-midi, alors que Tony relevait sa chemise pour montrer ses griffures à Howard, une nouvelle égratignure commença à dessiner sous le regard de la caméra et le chercheur décréta qu’il n’avait jamais vu de manifestation aussi intense auparavant.
A 19h, l’équipe remballa le matériel et la maison retrouva son calme. Tony et Debra étaient assis dans la chambre de Taylor quand soudain la jeune femme sentit une vague glacée se blottir le long de son flanc droit et elle sourit. Malgré ses différentes manifestations, Sallie trouvait encore la force de venir se réfugier contre elle.
A la sortie de l’épisode de Sightings, Debra et Tony trouvèrent étrange de se voir à la télé. Et puis, la réalité les rattrapa. Ne s’étaient-ils pas mis dans l’embarras, eux et leur famille? Le lendemain, les réactions des collègues de travail de Tony vinrent renforcer leurs inquiétudes. Bien qu’ils aient tenté de masquer son identité, tous ceux qui le connaissaient l’avaient aisément reconnu, et ses pires craintes se confirmèrent. Dans les magasins les gens les montraient du doigt et ils recevaient des coups de fil moqueurs à toute heure du jour comme de la nuit. Quelqu’un avait gravé Devil Boy (fils du diable) dans la poussière de leur voiture et les jeunes imitaient des fantômes quand ils passaient en voiture devant leur maison. Toutefois, certaines personnes se montraient sincèrement intéressées, ce qui leur remontait le moral.
Durant cette période, Barbara vint les voir à plusieurs reprises et à une occasion, elle eut une longue conversation avec Sallie. La fillette se réjouissait de la tournure des événements. Elle aimait ses jouets et sa poupée, et elle chérissait toujours autant Taylor. Par contre, les griffures n’étaient pas d’elle, et qu’ils puissent l’en blâmer la bouleversait. Debra et Tony demandèrent alors à connaitre le responsable, mais la fillette prétendit ne pas savoir. Barbara, qui doutait qu’elle n’ait rien vu, questionna Sallie pendant plusieurs minutes et la fillette finit par avouer qu’il s’agissait d’une femme qui lui était inconnue. Elle n’habitait pas la maison quand ils avaient emménagé. A cette époque, elle était rattachée à une autre personne qui était venue chez eux. Apparemment, la maison lui avait plu car elle avait décidé d’y rester. Sallie déclara ensuite que la femme n’était pas gentille et qu’elle commettait de nombreux méfaits dont la fillette se retrouvait accusée par la suite. A ce moment-là, Debra fit savoir à Sallie qu’ils avaient conscience qu’elle n’était pas à l’origine de toutes les manifestations et qu’ils l’aimaient. Tony et Debra l’ignorait encore, mais c’était la dernière fois qu’ils parlaient à Barbara. Peu de temps après, elle perdait la vie.
Vers la fin de la semaine, Sightings leur téléphona pour dire que les manifestations dont avaient été témoins les membres de l’équipe avaient créé un grand émoi et qu’ils souhaitaient tourner un nouvel épisode. Cette demande les prit au dépourvu. Ils en discutèrent pendant deux jours puis finalement, ils acceptèrent qu’ils reviennent.
À mesure que le 6 août approchait, la nervosité de Tony augmentait. Il se disputait sans cesse avec sa femme, partant de la maison quand le stress devenait trop intense. Parfois, lors de ces disputes, l’interphone de Taylor grésillait et Debra pensait que Sallie tentait de se mêler à la conversation.
Le samedi matin, les membres de l’équipe de la télé devant arriver sous peu, Debra leur fit de la place, déplaçant quelques objets, et elle en profita pour rappeler à Sallie que des gens de la télé revenaient chez eux. Tony, particulièrement anxieux, décida d’aller faire un tour en voiture pour se détendre. Durant son absence, Sallie, nerveuse elle-aussi, se manifesta en faisant brûler une petite flamme dans la lampe à huile. Il était près de midi lorsque l’équipe arriva et Debra fut rassurée en constatant qu’elle était constituée des mêmes membres que la première fois. Seul Tim White, l’animateur de Sightings, s’y était ajouté. Tim semblait fasciné par la description de leurs expériences mais Debra et Tony sentaient qu’il ne les croyait pas vraiment et pensait éclaircir le mystère. Peu de temps après, un coup frappé à la porte annonça Al Rauber, un chasseur de fantômes invité à assister au tournage de l’émission. Il était sceptique et il ne s’en cachait pas. Alors que Debra et Tony lui faisaient visiter la maison, il avançait une explication pour chaque phénomène, et ses explications ressemblaient plus à des accusations de tricherie qu’à autre chose. Puis, alors que la journée s’écoulait, ses commentaires se firent franchement insultants. Il se montrait froid, méprisant et condescendant lors de toutes ses conversations avec eux, et il leur étaient très difficile de demeurer agréables. Il prit chacun d’eux à l’écart et leur déclara qu’il pensait que l’autre était à l’origine des manifestations, qui étaient typiques d’un poltergeist. D’après lui, le responsable avait probablement été violenté durant son enfance et l’émotion intense occasionnée par ce traumatisme créait les manifestations. Pour s’en libérer, il suffisait de voir un psychiatre. Ce jugement rendit Debra furieuse mais ce ne fut que le lendemain, quand elle en discuta avec son mari, qu’ils comprirent que Rauber leur avait tenu le même discours à tous les deux.
Tout au long de la journée ils se déplacèrent dans la maison, tentant de trouver des explications aux courants d’air froid et aux perturbations électriques. A un moment donné, alors qu’ils se trouvaient au salon, Tony, qui portait Taylor, tendit soudain le bras et tout le monde cru qu’il désignait quelque chose. Comprenant que personne ne saisissait ce qu’il s’efforçait de montrer, Tony dit d’une voix calme: » Regardez mon bras. «
Deux longues griffures ornaient maintenant son avant-bras et soudain, alors que George épongeait le sang de ses blessures, commencèrent à apparaitre des marques de coups sur son front. Tim en fut sidéré. Vers la fin de la journée, il leur demanda si Rauber pouvait passer la nuit chez eux mais après avoir supporté son attitude déplaisante toute la journée, ils n’avaient aucune envie de passer le reste de la soirée avec lui. A la fin du week-end, Tony et Debra étaient tous les deux lessivés.
Quelques semaines plus tard, juste après la diffusion du second épisode de Sightings, le téléphone sonna. Apparemment, Tim et l’équipe s’inquiétaient pour leur sécurité et ils désiraient revenir une troisième fois. Comme leur dernière visite n’avait eu aucun effet positif et que Tony y était franchement opposé, Debra hésita un moment mais ils lui certifièrent qu’ils amèneraient avec un eux un excellent médium, qui pourrait probablement les aider, et la jeune femme se laissa convaincre. Néanmoins, la réaction de Tony fut pire que ce qu’elle craignait et pour mettre fin au conflit, Debra fit semblant de céder.
Dans l’après-midi, une femme aux cheveux sombres sonna à la porte et se présenta sous le nom de Colleen. Elle expliqua à Debra qu’elle avait habité la maison pendant huit mois et que durant cette période, il s’était produit un certain nombre d’étranges incidents. Sa fille, en particulier, s’était amusée avec une amie imaginaire nommée Sallie. Colleen ne s’était jamais préoccupée de cette amie imaginaire, et après leur départ de la maison, la fillette n’avait plus jamais mentionné cette amie. Très excitée, Debra demanda à Collen si elle accepterait de raconter son histoire à Sightings et la jeune femme accepta. En apprenant que Colleen corroieraient leur histoire, Tony accepta de laisser revenir l’équipe de télévision.
Peter James, le médium, arriva assez tôt et Debra l’observa alors qu’il sortait de la voiture l’amenant chez eux. Il n’avait reçu que peu de renseignements sur le cas, et il avait tout à découvrir. En descendant de voiture, il aperçut le visage d’une petite fille à la fenêtre de la chambre parentale, ce qui le laissa perplexe.
Il émanait de cet homme une impression de calme et de réconfort. Courtois, il sollicita l’autorisation de visiter les lieux et se mit à marcher, la tête basse, produisant de petits bruits étranges. Alors qu’il revenait vers la petite d’entrée, soudain il s’immobilisa et tendant le doigt vers l’escalier il déclara: » Une petite fille se tient debout là-haut. «
Comme la caméra approchait, il la stoppa de la main puis d’une voix amicale, et commença à monter les marches: » Coucou, peux-tu me parler? Sallie, est-ce ainsi que tu te nommes? «
En entendant ces mots, Debra se sentit folle de joie. En quelques minutes, il était arrivé à détecter la présence de l’enfant et à découvrir son prénom. De plus, la fillette semblait accepter de le laisser approcher.
Après avoir interviewé Colleen, l’équipe suivit Peter afin de recueillir ses commentaires sur les manifestations paranormales. Alors que tout le monde se trouvait dans le couloir, devant la chambre parentale, Peter signala une forte résistance: ce qui se trouvait dans la chambre ne voulait pas qu’il y entre. Afin de montrer à l’esprit qu’il n’était pas intimidé et n’entendait pas reculer, il commença à lui parler puis il fit un ou deux pas à l’intérieur de la pièce. A ce moment-là, un courant d’air froid traversa l’assistance et Tony devint nerveux. Quelques instants plus tard, il se plaignit d’une sensation de brûlure au bas du dos et s’éloigna en direction de l’escalier. Peter, qui ignorait tout des attaques, tenta alors de rassurer Tony et Debra lui demanda de soulever sa chemise. Les lettres M et C avaient été gravées au bas de son dos. Alors que le caméraman filmait ces griffures, des crépitements électriques résonnèrent autour d’eux et Peter pénétra une nouvelle fois dans le chambre, déclarant à l’esprit qu’il n’avait pas peur de lui. Lui demandant son nom , l’esprit ne lui donna qu’une lettre, la B, puis agressa Tony une fois de plus, mettant le feu au dos de sa chemise. Lorsque les flammes furent éteintes, ils s’aperçurent que seule la chemise avait brûlée, laissant sa peau intacte.
Lors d’une visite au cimetière, le médium les amena à une tombe dont l’inscription était illisible. Debra, après avoir fait des recherches, découvrit qu’elle appartenait à une fillette de cinq ans, qui était morte en 1905 sur un chemin de terre qui se trouvait juste derrière la maison. Elle s’appelait Sallie.
Debra eut énormément de mal à faire accepter à Tony que l’équipe de Sightings revienne pour une quatrième visite. Il avait envie de tourner la page, de retrouver une vie normale et, surtout, que ses amis et sa famille cessent de l’interroger à propos de ce qu’ils avaient vu à la télé. Debra, quand à elle, cherchait toujours des réponses et après des jours de discussions enflammées, de bouderies et de colère, Tony accepta qu’ils reviennent.
Cette fois, ils avaient amené des tas d’appareils électroniques et la cuisine avait été transformée en laboratoire. Des caméras thermiques avaient été installées dans toute la maison, sauf dans la chambre parentale, pour préserver leur intimité. Tony, qui souhaitait prouver qu’il ne se blessait pas lui-même, avait retiré tous ses bijoux et exigé que quelqu’un se tienne sans arrêt à ses côtés pour observer ses gestes et ses déplacements.
Kerry Gaynor, célèbre pour son travail dans le cas de Doris Bither, avait reçu cette charge et il allait rester près de lui pendant toute l’enquête. Il se présenta au milieu de l’après-midi, soucieux de la sécurité de la famille, et passa l’essentiel de la nuit assis au bout du divan, près de Tony. Depuis plusieurs mois, en raison de son expérience, Sightings consultait le Dr Gaynor, le faisant intervenir à plusieurs reprises dans l’émission. A la fin de sa première entretenue, il signala qu’il se passait plus d’une chose dans la maison. Outre les manifestations paranormales qui ressemblaient à un jeu, il y avait quelque chose d’autrement plus dangereux. Durant son séjour, il fut témoin de 11 attaques individuelles à l’encontre de Tony, alors qu’il était assis à ses côtés. Par la suite, il déclara qu’au cours de ses 20 années d’expérience et des 850 cas sur lesquels il avait travaillé, il n’avait jamais assisté à une activité semblable et que certaines des attaques subies par Tony étaient terrifiantes. Il qualifia leur cas d »expérience intéressante, excitante et potentiellement dangereuse.
Le soir suivant le départ de l’équipe de télévision, une femme vint proposer son aide. La femme, qui était médium, pensait qu’un nettoyage de la maison, dirigé par un shaman, pourrait leur être d’un grand secours. Sa proposition tombait au bon moment, car Tony avait le corps recouvert de griffures. A chaque visite de l’équipe de télévision, il semblait que les attaques se faisaient plus fréquentes et plus violentes.
Quelques heures plus tard, la femme se présenta vêtue d’une longue tunique de cuir blanc ornée de perles, de turquoises, d’argent et de plumes. Elle leur expliqua qu’elle avait confectionné la tunique de ses mains, comme le voulait la tradition, et que chaque ornement possédait un sens puis elle décrivit ce qu’elle allait accomplir, signala qu’il risquait d’y avoir beaucoup d’activité dans la maison lorsqu’elle prierait l’esprit, ou les esprits, de partir.
Une ambiance lourde et menaçante pesait déjà sur la maison et Debra éprouvait une sourde appréhension à l’idée de ce qu’ils allaient accomplir. Après avoir enfumé la maison de haut en bas en faisant brûler de la sauge, la médium posa une bougie allumée sur le plancher, elle éteignit toutes les lumières et tout le monde prit place, assis en tailleur autour de la bougie. Tony et Debra avaient pour consigne de se tenir par la main et de se pas rompre le cercle, quoi qu’il arrive. Sous la direction de son shaman, la médium récita quelques prières puis elle se mit à méditer. Soudain, elle sentit la présence d’un homme âgé, un gentilhomme qui habitait la maison depuis longtemps, et d’une femme qui tentait de se dissimuler.
Quand elle décrivit une fillette effrayée blottie dans un coin de la chambre d’enfant, Debra reconnut immédiatement Sallie. La médium leur demanda si ils souhaitaient qu’elle s’en aille, et Debra ne sut que répondre. Elle avait le sentiment que la fillette serait plus heureuse de l’autre côté, mais elle n’avait pas envie de l’obliger à partir. La médium lui conseilla de la garder pour le moment, et d’aviser plus tard, ce que Tony et Debra approuvèrent. Aussitôt, un vent glacé vint caresser les genoux de Debra, qui reconnut sa protégée.
Après de nouvelles prières, la médium demanda au couple d’imaginer avec elle chaque pièce inondée de lumière blanche, en commençant par la cuisine. Elle dut s’arrêter entre deux salles pour aider l’homme, qui ne comprenait pas pourquoi il devait partir de l’autre côté, puis ce fut au tour de la femme, qui opposa une farouche résistance et se défoula sur Tony. Finalement, au bout d’un moment, la femme sembla céder et un sentiment de légèreté enveloppa la maison. Allumant les lumières, Debra regarda les épaules de Tony, qui étaient maintenant couvertes de griffures. La médium les prévint qu’il pouvait y avoir quelques résidus d’énergie pendant quelques jours mais que cela se calmerait par la suite et qu’ils sauraient, alors, si la purification avait réussi.
Ils espéraient s’être débarrassé de l’entité malfaisante, mais malheureusement, tel n’était pas le cas. Depuis quelques temps, Tony s’entretenait avec un prêtre de l’abbaye de Saint Benoît et il se sentait nettement mieux après chaque rencontre, mais quelques jours plus tard la colère, les pensées et les sentiments haineux l’envahissaient de nouveau. Lors de ces rencontres hebdomadaires, Tony racontait au prêtre l’essentiel de ce qui se passait, mais il gardait pour lui certaines choses personnelles. Il avait décidé de ne pas lui parler des griffures, des voix, des grattements à l’intérieur des murs, de ses sautes d’humeur, de sa haine à l’égard de sa femme et des craintes qu’il éprouvait. Peu de temps après ses premiers entretiens avec le prêtre, Tony parla à sa femme de ses expériences les plus éprouvantes. Au cours des mois précédents, il avait perdu le sommeil, l’appétit, il avait peur en permanence et il était devenu haineux. Cet homme ne ressemblait en rien à celui que Debra avait épousé. Souvent, il se plaignait d’être malade et à plusieurs reprises ils s’étaient rendus au Service des urgences de l’hôpital. Il ressentait des douleurs dans la poitrine et dans le bras ainsi que d’autres symptômes inquiétants mais les analyses ne révélaient jamais rien d’anormal.
A la difficulté de composer avec une entité perfide s’ajoutait les frais médicaux qui s’accumulaient. Tony devant souvent s’absenter du travail leur situation financière était devenue précaire. A ce moment-là, Debra commença à douter de l’identité de Sallie et elle promit à son mari de le soutenir. Tony, soulagé, se sentit moins seul. L’amour qu’il ressentait pour Debra lui permettait de lutter contre les pensées qui s’insinuaient dans son esprit et il se rendit bientôt compte que sortir de la maison l’aidait également. Debra et Tony décidèrent alors de s’éloigner de chez eux autant que possible, passant beaucoup de temps chez les parents de Tony.
Le prêtre que consultait Tony avait prévu venir chez eux dans le but de mieux saisir ce que Tony lui avait relaté. Il avait aussi parlé de bénir la maison, mais il mourut soudainement avant de l’avoir fait. Jamais ils ne surent si sa mort avait un lien avec ce qu’il avait prévu de faire.
Un jour, Tony rentra à la maison peu avant le réveil de Debra. La jeune femme se leva, se prépara pour le travail puis elle partit pendant que Tony tentait de se détendre avant d’aller dormir. Comme il était assis sur le divan, d’horribles pensées envahirent son esprit. Et toutes ces pensées concernaient sa femme. Il alla se servir un bol de céréales et, se tournant pour ranger le lait, il aperçut qu’un chat était en train de boire dans son bol. Il ignorait d’où venait l’animal, et comment il était entré dans la maison, mais cette vision le rendit fou de rage. Il s’approcha de quelques pas, tira violemment un grand couteau du support près de la cuisinière et poignarda le chat. Après quoi, il se sentit satisfait et, se souvenant à quel point sa femme aimait les chats, il décida de le laisser là afin qu’elle le trouve à son retour. Sans s’en faire le moins du monde, il se rendit au salon et s’assit sur le divan, envahit par de terribles sentiments: » Je vais la poignarder, elle aussi « , songeait-il. » Je ne supporte pas sa façon de me regarder. C’est sa faute si nous sommes ici. Je ne supporte pas son caractère acariâtre. Je ne supporte pas de la regarder. «
Tony en vint à élaborer un plan détaillé pour tuer Debra à son retour. » Quand elle va s’approcher de moi, je vais lui trancher la gorge. Il demeura dans cet état toute la matinée, avec le chat mort dans la cuisine.
Puis, en début de l’après-midi, il monta s’habiller et sortit pour aller chercher Taylor, qui se trouvait chez ses parents. À son retour, quelques heures plus tard, il s’était ressaisi. Il se débarrassa rapidement du chat mort afin qu’elle ne le voit pas et songea: » Seigneur! Mais qu’est-ce qui m’a pris? «
Deux jours après avoir tué le chat et planifié la mort de sa femme, Tony connut une expérience qu’il relatait en ces termes:
» Je ne pensais à rien de particulier, je vaquais juste à mes occupations quotidiennes. Je venais de sortir du lit et me préparais à descendre.
J’atteignais la porte quand j’ai soudain été violemment bousculé par-derrière. J’ai eu l’impression que quelqu’un s’était élancé dans mon dos et m’avait poussé de toutes ses forces. Mes pieds ont quitté le sol, je me suis retrouvé suspendu dans les airs, et j’ai été projeté en direction de la rampe de l’étage, qui se trouvait à environ un mètre devant moi. Le haut de mes cuisses a heurté la rampe et mes genoux, mes jambes et mes pieds ont cassé par inadvertance trois des barreaux la soutenant. J’ai eu peur en diable, et encore à ce jour, je ne sais pas ce qui m’a retenu de basculer par-dessus la rampe et de dévaler l’escalier la tête la première.
Abasourdi et les nerfs en boule, j’ai descendu l’escalier en m’agrippant à la rampe. Je me suis rendu au salon, où, trop effrayé pour bouger, je suis resté assis sur le divan le reste de la journée. Je tressaillais au moindre bruit.
J’ai téléphoné à Debra à son travail, dans l’espoir que je me sentirais moins seul en entendant une voix connue. Je ne lui ai pas raconté ce qui venait de se passer, mais je lui ai déclaré que j’étais habité par un sentiment tenace, le sentiment que quelqu’un allait être blessé, et que je croyais que ce serait elle. Je lui ai ensuite dit qu’il nous fallait vraiment quitter cette maison. Elle m’a répondu que nous en discuterions à son retour, et j’ai craint que mes paroles soient, une fois de plus, tombées dans l’oreille d’un sourd.
Je suis resté dans le salon jusqu’à son retour. Je lui ai fait part de ce que j’avais vécu le matin et je me suis aperçu que, cette fois, elle me prenait au sérieux. C’était peut-être en raison du ton de ma voix lorsque je l’avais appelée, ou d’une chose que je lui avais dite. Quoi qu’il en soit, cela l’avait touchée. «
Après l’attaque dont son mari avait été victime, Debra prit soudain conscience de la gravité de la situation et elle comprit qu’il leur fallait quitter la maison le plus rapidement possible. Immédiatement, ils commencèrent à emballer leurs affaires et deux semaines plus tard, le 31 octobre 1994, ils emménageaient dans une maison du même quartier. Après leur déménagement, plus jamais ils ne connurent de phénomènes paranormaux.
Après avoir quitté la maison, Tony redevint lui-même et Debra comprit qu’il avait été possédé par une entité maléfique. Néanmoins, jamais elle ne parvint à déterminer si Sallie était vraiment l’esprit innocent d’un enfant ou si la fillette et l’entité ne faisaient qu’un. Depuis, Debra, Tony et leurs trois fils résident toujours à Atchison, au Kansas. Ils donnent parfois des conférences sur le paranormal, ils ont ouvert un site web, et Debra Pickman a écrit un livre qui relate leur expérience: The Sallie House Haunting: A True Story.